CETA negotiators Johnson Pierre Marc : Différence entre versions

De La Quadrature du Net
Aller à la navigationAller à la recherche
(À propos du manque de transparence des négociations)
Ligne 58 : Ligne 58 :
 
<br />
 
<br />
 
Et, en ce sens-là, oui, il y a eu des consultations, il y a une ouverture. Je n'ai pas refusé de rendez-vous autrement que ceux qui m'apparaissaient incompatibles avec les fonctions ou qui ne m'apparaissaient pas utiles, compte tenu de l'état du dossier. Donc, oui, on travaille dans la discrétion, mais, par définition, c'est ça, une négociation commerciale.</blockquote>
 
Et, en ce sens-là, oui, il y a eu des consultations, il y a une ouverture. Je n'ai pas refusé de rendez-vous autrement que ceux qui m'apparaissaient incompatibles avec les fonctions ou qui ne m'apparaissaient pas utiles, compte tenu de l'état du dossier. Donc, oui, on travaille dans la discrétion, mais, par définition, c'est ça, une négociation commerciale.</blockquote>
 +
 +
 +
 +
 +
<blockquote>
 +
Mme Beaudoin (Rosemont): Merci, M. le Président,merci. Oui, M. Johnson, bonjour. Bonjour aussi à ceuxqui vous accompagnent, M. Muzzi particulièrement, queje connais bien puisqu'il était au ministère des Relationsinternationales quand j'étais ministre. Non pas il y a 25 ans,puisque, M. Johnson, il y a exactement 25 ans, vous étiezpremier ministre du Québec et vous m'aviez convaincuede revenir de Paris, où je coulais des jours heureuxcomme déléguée générale, pour me présenter avec vous.Alors, je voudrais...CI-90 page 7
 +
 +
M. Johnson (Pierre Marc): Pour être ministre.
 +
 +
Mme Beaudoin (Rosemont): Oui, c'est vrai,ministre non élue. Alors, M. le Président, je voudrais poserun certain nombre de questions relativement courtes enespérant justement avoir des réponses relativement courtes,de telle sorte que pendant les 20 minutes on pourra échangersur des thèmes que je vais vous donner immédiatement,M. Johnson: bien sûr, les marchés publics, je veux revenirlà-dessus; la culture; et puis le déficit démocratique.Je vais commencer par le déficit démocratique. Jecrois qu'il est profond dans ce cas-ci. Et personnellementje le regrette beaucoup, parce que nous avons demandé...la commission d'ailleurs a demandé au gouvernementd'envoyer aux membres de cette commission, pour qu'onpuisse savoir de quoi l'on parle, un certain nombre dedocuments. On en a reçu, mais les principaux. on ne les apas reçus.Alors, le principal était bien sûr le projet d'accordle plus récent concernant tous les sujets de négociation encours, l'état de la négociation, la liste des points d'accord,de points de désaccord, bon, en tout cas, il y avait cesdocuments-là que l'on ne recevra pas.Et, si je vous dis ça, M. Johnson, c'est parce qu'aumoment de la négociation de la Zone de libre-échange desAmériques, en 2001, au moment du Sommet des Amériques,j'étais ministre des Relations internationales, et nous avionseu le document, et nous l'avions rendu public. Le gouver-nement canadien, Pierre Pettigrew, je dois dire, avait acceptéque ce document, qui était en cours de négociation, soit rendupublic. Parce que je crois, moi, sincèrement qu'au-delà desgens d'affaires la société civile a le droit de savoir ce qui sediscute et que c'est un manque de transparence puis un déficitdémocratique effectivement que je constate et que je regrette.Je vais vous dire que le dernier document que l'on a eu viala société civile, justement, parce qu'il y a eu une fuite, hein,«draft consolidated text», et c'était, je crois, au mois de févrierdernier. Il s'est passé beaucoup, beaucoup de choses depuis,on voit ça comme ça.Ce qui m'amène aussi à vous poser une sous-question: Coudon, la langue de la négociation, c'est-u quel'anglais? Parce que là je vois, là, que ce document-làétait qu'en anglais, alors qu'avec la Zone de libre-échangedes Amériques M. Pettigrew nous avait assurés que lesquatre langues des Amériques étaient utilisées, c'est-à-direl'espagnol, bien sûr, le portugais, l'anglais et le français,puis il avait fait traduire l'équivalent de ce «draft»-là.Alors donc, mes deux questions: Pourquoi on nepeut pas avoir le document, alors que, pour la ZLEA, onl'avait eu, en 2001? Et pourquoi, donc, que tout est en anglais,alors qu'il y a 14 pays qui sont membres de la francophonieen Europe? Ça ne paraît pas toujours, là, dont le plus grandet le plus important d'entre eux, bien sûr, qui est la France,mais il y en a 14 qui sont membres de la francophonie.55 pays membres de la francophonie, 14 qui sont européens,puis tout nous arrive en anglais, puis le Québec, puis leCanada, tu sais, ça devrait être au moins dans les deux languesofficielles du pays auquel nous appartenons.n (16 heures) n
 +
 +
Le Président (M. Drainville): M. Johnson.
 +
 +
M. Johnson (Pierre Marc): Alors, sur le déficitdémocratique, rapidement, il est exact que les textes dontj'ai connaissance, et dont nos équipes ont connaissance, neCI-90 page 8Débats de l'Assemblée nationalesont pas rendus publics. C'est un choix qui est fait par leséquipes de négociation de part et d'autre. Les Européensl'exigeant, et, je dirais, aussi du côté fédéral, il y a unetradition de ne pas rendre ça public très rapidement.Il faut comprendre que ce qu'on appelle le texte denégociation, c'est le texte sur la base duquel on sait qu'onva discuter dans les dernières phases de la négociation pourdire: Je te consens ça si tu me consens telle phrase, j'enlèvecelle-là si tu enlèves l'autre. Donc, la nature de ce documenttouche des contenus différents mais n'est pas nécessairement...ne signifie pas nécessairement que ce sont les positions desparties qu'on y voit. On y voit des positions, et le texte estrelativement neutre. Tant et aussi longtemps qu'on ne s'estpas entendus sur les libellés, ça demeure un texte de travail.Et c'est pour ça qu'en général les négociateurs sont extrême-ment hésitants à les faire circuler, surtout globalement. Jesais cependant par expérience que dans certains cas desextraits de texte, au fur et à mesure que la négociation avance,peuvent être rendus publics pour les fins de recueillir desopinions. Et puis, dans certains cas, il y a des gens qui fontdes ballons avec ça.Deux. Sur la langue, c'est l'Union européenne quia choisi de faire de l'anglais la langue de communicationdans cette négociation, parce qu'ils ont des équipes, je crois,qui viennent d'une quinzaine... ou 17 pays, je ne sais plus,sur un total de 27 en Europe, et la langue commune detravail de ces gens, c'est bel et bien l'anglais et non le français,comme ça l'a déjà été. Cela dit, mes conversations avecMauro Petriccione, le négociateur en chef de l'Europe, sesont toujours conduites en français et... mon italien n'étantpas tellement bon. Mais son français et son anglais étantimpeccables.
 +
 +
Le Président (M. Drainville): Mme la députéede Rosemont.
 +
 +
Mme Beaudoin (Rosemont): Oui. Bon, alors, ons'adressera à l'Union européenne en temps et lieu, maisc'est quand même étonnant, parce qu'à l'Union européennenormalement il y a un certain nombre de langues qui sontofficielles et qui sont des langues de travail, d'ailleurs, del'Union européenne, dont bien sûr le français, à la Commis-sion européenne. Mais ça ne parait pas beaucoup; je conçoisça, je comprends ça.Mais je veux quand même revenir sur cette idéeque... pourquoi la population, pourquoi la société civile nepourrait-elle pas, même si les positions justement ne sontpas arrêtées, même si les libellés ne sont pas définitifs, onsait que tout ça s'échange... Il me semble, en tout cas, quec'est le genre de chose qui fait en sorte que la population sesent de plus en plus éloignée des décisions qui se prennenten son nom derrière des portes closes dans des négociationsinternationales et que, pour la démocratie puis la vitalitédémocratique de nos sociétés, il me semble qu'on devraittous être inquiets de ces façons de faire, parce que ça éloignele citoyen, qui se sent de plus en plus impuissant et puis quin'a plus confiance ensuite dans ces institutions. En tout cas,moi, c'est ce que je constate, M. Johnson.
 +
 +
M. Johnson (Pierre Marc): Je suis sensible àce que vous dites, d'autant plus que j'ai commis quelquesécrits sur ces questions il y a quelques années, à l'époquedes négociations multilatérales, la participation de la sociétécivile à ces négociations. Je ne veux pas me... Je ne veux6 octobre 2010pas me cacher derrière l'aspect extraordinairement techniquede ces textes, mais c'est un fait que ces textes sont extrêmementtechniques. Deux, il y a dans ces textes parfois des ballonsà l'autre partie pour voir comment elle réagira dans laprochaine version du texte. Donc, encore une fois, ces textesne représentent pas nécessairement la position des parties,elle n'est qu'une des formes sous laquelle on voit quels sontles enjeux.Sur le plan de la consultation, par ailleurs, laconsultation est assez ouverte. Nous avons rencontré, surle plan des consultations, non seulement des entreprises,non seulement des coalitions comme la coalition culturelle,nous avons rencontré des associations industrielles, j'ai étéexposé à, je dirais, moi, une douzaine de publics depuis ledébut de cette négociation, au Québec, où j'ai eu l'occasionde tenter de répondre à des préoccupations et surtout deprendre note des priorités, des objectifs ou des craintes oudes appréhensions de beaucoup de groupes. Et je crois quele processus démocratique, il se fait plus par là. Pour lesparlementaires, il y a deux moyens: il y a celui qu'on aaujourd'hui, tout limité que soit mon couloir de révélerdes choses qui ne doivent se dire seulement qu'à une table,mais aussi, je crois que les chefs des partis de l'oppositionle savent, le premier ministre m'a autorisé à répondre àdes questions, à des personnes que désignerait l'opposition,dans un contexte qui est in camera, et je suis prêt à uneconversation peut-être un peu plus ouverte sur certainsenjeux, dans un contexte où ce n'est pas public, comme jesuis tout à fait prêt, avec l'autorisation du premier ministre,à rencontrer l'ensemble du caucus du Parti québécois oudu deuxième parti d'opposition.
 +
 +
Mme Beaudoin (Rosemont): Bon, très bien.
 +
 +
Le Président (M. Drainville): Mme la députée deRosemont.
 +
 +
Mme Beaudoin (Rosemont): Merci, M. le Président.Non, c'est la première fois, honnêtement, que j'entends parlerde ça, là. Alors donc, on y reviendra sûrement. Je veux quandmême dire que c'est un outil essentiel, là, dont on aurait eubesoin aujourd'hui, là, on en est restés aux textes donc dumois de février. Et je veux aussi dire, en terminant sur cesujet-là, que la question de la langue, quand même, que legouvernement du Québec, le gouvernement canadien aientaccepté cette exigence européenne sans... sans dire... sansrien dire me déçoit. Point. Bon.
 +
</blockquote>
 +
 +
  
 
[[Category:CETA negociators]]
 
[[Category:CETA negociators]]
 
[[Category:CETA]]
 
[[Category:CETA]]
 
[[Category:CETA fr]]
 
[[Category:CETA fr]]

Version du 3 octobre 2012 à 17:21

À propos d'un conflit d'intérêt

Source : Journal des débats de la Commission des institutions de l'Assemblée Nationale du Québec

M. Khadir: Merci, M. le Président. Mme Bastien, M. Muzzi, M. Johnson, bienvenue. M. Johnson, votre rémunération de 1,4 million ne me cause aucun problème, si cette rémunération est pour une expertise aussi précieuse que la vôtre mais indépendante. Moi, je pense que c'est de l'argent bien placé; encore faut-il que cette expertise soit indépendante. Vous savez que, de mon point de vue, vous n'êtes pas en situation d'indépendance, vous êtes en situation de conflit d'intérêts en raison de vos relations d'affaires avec Heenan and Blaikie, et aussi dans le cas de Veolia, d'ailleurs une entreprise qui tue la concurrence avec certaines manoeuvres de collusion, comme on l'a connu ici, au Québec.

Maintenant, je ne vous poserai pas de question là-dessus, je vais tout simplement...

M. Johnson (Pierre Marc): Vous allez vous contenter, si je comprends bien, des affirmations gratuites.

M. Khadir: Non. Non, non, non. Je vais vous déposer une définition clinique de «conflit d'intérêts», définition qui émane...

M. Johnson (Pierre Marc): ...bien lue, j'espère.

M. Khadir: ...du Conseil de l'Europe. Oui.

M. Johnson (Pierre Marc): Vous l'avez bien lue?

M. Khadir: Oui, oui. Je vais vous... Est-ce que c'est moi qui pose la question ou c'est M. Johnson?

Le Président (M. Drainville): ...il reste 2 min 30 s, M. le député de Mercier.

M. Khadir: Très bien. Je vous soumets donc, à la commission et à vous, une définition clinique. Vous allez peut-être comprendre pourquoi, si on suit les définitions du Conseil de l'Europe, un citoyen, M. Hamel, de Québec, qui m'a écrit ce matin -- que je vais vous déposer sa lettre aussi -- président des aînés souverainistes, demande que vous ayez l'obligeance de vous retirer de ce dossier.
Mais, en attendant -- vous jugerez vous-même -- j'ai une question plus précise, pointue et une question générale. La question précise, c'est: Est-ce que vous êtes d'accord pour rendre disponible la liste de tous les lobbyistes que vous avez rencontrés, dans le domaine économique, industriel, commercial ? Si ce n'est pas possible d'avoir toute la liste, est-ce que vous pouvez nous dire si vous avez rencontré des gens... en fait, des lobbyistes pour SNC-Lavalin, sa division nucléaire, des filiales de Power Corporation, actifs via Areva ou d'autres, dans le domaine, dans la filiale nucléaire ou des lobbyistes du secteur de gestion des déchets nucléaires ? Ça, c'est la question pointue.
Maintenant, dans le dossier d'information que vous avez soumis, vous...

Le Président (M. Drainville): M. le député de Mercier, il va rester une minute pour la réponse, là.

M. Khadir: Très bien. Le libre-échange, vous dites que ça favorise la croissance et améliore le bien-être des participants. Or, depuis les dernières années, un prix Nobel d'économie, Joseph Stiglitz, dit le contraire, dit que c'est très mauvais pour les sociétés. Ici même, Yvan Allaire, tout récemment, dans un article récent dans Le Devoir, dit que c'est porteur de graves problèmes sociaux, que la déréglementation des marchés a conduit à la crise financière qu'on connaît actuellement.
Et ce n'est pas bon pour nos travailleurs. Quatre travailleurs sur cinq, depuis 25 ans qu'il y a l'ALENA, ont vu une baisse de leurs revenus et une stagnation du pouvoir d'achat de la classe moyenne. Alors, pourquoi voulez-vous que la nation québécoise, le peuple québécois accepte cette mauvaise médecine ?

Le Président (M. Drainville): M. le député de Mercier, il n'y aura plus de temps pour votre réponse, et j'ai bien précisé les règles du jeu et en séance de travail et ici tout à l'heure, au début. Il reste 30 secondes pour la réponse, M. Johnson. Je vous laisse le soin de choisir sur quel aspect...

M. Johnson (Pierre Marc): Oh! vous savez, en 30 secondes, je pense qu'il est difficile de... il est difficile de...

M. Auclair: M. le Président, pour permettre à M. Johnson de répondre et réfuter les allégations de mon collègue, je n'ai aucun problème à ce qu'il y ait du temps du parti ministériel qui soit utilisé...

M. Johnson (Pierre Marc): ...je suis convaincu, M. le député, mais je pense...

Le Président (M. Drainville): Est-ce qu'il y a consentement des membres de cette...

M. Johnson (Pierre Marc): Non, M. le Président, si vous permettez, je ne demande pas que vous alliez au-delà de ça, je pense que la transformation de cette commission en tribunal du peuple, populiste et démagogique, n'est pas le lieu. Si le député de Mercier veut faire des accusations, qu'il les fasse de préférence en dehors du Parlement, puisqu'il devra assumer sa responsabilité.
Deuxièmement, je n'ai à dire, M. le Président, dans ces 30 secondes, que je respecte mon devoir de loyauté, d'intégrité, d'indépendance, de désintéressement, de diligence, de prudence et de confidentialité, comme l'exige le code de déontologie de ma profession.

Des voix: ...

Voir aussi : Le Devoir - Amir Khadir crie au conflit d'intérêts - Absurde, dit Pierre Marc Johnson


À propos du manque de transparence des négociations

Le Président (M. Drainville): M. le député de Portneuf. Ah! Mme la députée de Gatineau? Oui.

Mme Vallée: Bien, en fait, oui, j'avais une petite question complémentaire, parce que je sais aussi que ce sera l'objet de questionnement, puis je préfère qu'on l'aborde directement.
Je sais, M. le premier ministre, qu'il y a des éléments qui ne peuvent être rendus publics, au niveau de la négociation, et certains ont déploré le manque d'information, certains collègues de cette Assemblée ont déploré le manque d'information. Ça a malheureusement fait couler aussi un peu d'encre dans les médias. Mais on est en pourparlers de négociation, c'est déjà quand même assez exceptionnel que vous soyez présent et que vous participiez à l'exercice auquel on se livre cet après-midi. C'est assez exceptionnel que, cet exercice-là, on en est à sa deuxième séance en un an. J'aimerais qu'on puisse peut-être également expliquer certains éléments plus délicats et certaines restrictions que vous pourriez avoir cet après-midi dans la divulgation d'information.

M. Johnson (Pierre Marc): Je vous remercie de cette question, Mme la députée de Gatineau. Vous allez vous rendre compte, au fur et à mesure des questions, de là où je ne réponds pas, et pour des raisons de l'intérêt de cette négociation, hein? On se comprend qu'une négociation, même avec nos amis européens, avec qui nous avons toutes sortes d'atomes crochus, ce n'est pas une séance de bienfaisance. C'est une négociation commerciale, et il y a d'énormes intérêts qui sont en cause de part et d'autre, et un certain nombre de ces intérêts-là, pour pouvoir être, je dirais, protégés d'un bout à l'autre de la négociation, doivent être tenus au secret.
C'est d'ailleurs le choix qu'ont fait les 27 pays de l'Union européenne et l'ensemble des provinces et du gouvernement fédéral. L'Union européenne... la Commission européenne ne veut pas que les textes soient rendus publics, les pays d'Europe non plus -- les membres -- et, du côté canadien, pour le Québec, nous sommes dans une situation nouvelle, comme pour les autres provinces, où nous sommes consultés. Nous avons accès à la documentation secrète du gouvernement fédéral sur un certain nombre de dossiers extrêmement délicats, et qui impliquent l'intérêt public, et qui, s'ils étaient rendus publics, pourraient créer des mouvements de spéculation. Il faut comprendre qu'il y a une raison au secret, hein, une raison au secret quand l'État fait une négociation. Cette raison, c'est de protéger l'ensemble des intérêts des collectivités qui sont en cause, pour s'assurer que des gens ne partent pas avec des informations privilégiées et se mettent à en tirer un avantage, notamment un avantage spéculatif sur des marchés qui parfois peuvent être volatils.
Cela dit, j'ai procédé à de... non seulement moi, mais le ministère, nous avons procédé à de nombreuses consultations. Nous avons vu non moins de 100 personnes et groupes au cours de cette négociation, au Québec, et qui ont des intérêts de toutes sortes: dans le monde culturel; dans le monde industriel; dans le secteur de l'aluminium; dans le secteur du bois, des produits cosmétiques, des chaussures, du textile, des jeux vidéo, de l'aérospatial, des pâtes et papiers, des vins et spiritueux, de l'industrie pharmaceutique; les universités, l'industrie bioalimentaire; l'UPA -- que j'ai rencontrée à quatre reprises -- les groupes syndicaux; les ordres professionnels, que j'ai rencontrés également, les ordres professionnels, parmi lesquels ceux qui s'intéressent à cette question de la reconnaissance des qualifications; le monde de l'édition, de façon spécifique dans le monde de la culture en particulier; et des entreprises québécoises exportatrices de toutes sortes.

Et, en ce sens-là, oui, il y a eu des consultations, il y a une ouverture. Je n'ai pas refusé de rendez-vous autrement que ceux qui m'apparaissaient incompatibles avec les fonctions ou qui ne m'apparaissaient pas utiles, compte tenu de l'état du dossier. Donc, oui, on travaille dans la discrétion, mais, par définition, c'est ça, une négociation commerciale.



Mme Beaudoin (Rosemont): Merci, M. le Président,merci. Oui, M. Johnson, bonjour. Bonjour aussi à ceuxqui vous accompagnent, M. Muzzi particulièrement, queje connais bien puisqu'il était au ministère des Relationsinternationales quand j'étais ministre. Non pas il y a 25 ans,puisque, M. Johnson, il y a exactement 25 ans, vous étiezpremier ministre du Québec et vous m'aviez convaincuede revenir de Paris, où je coulais des jours heureuxcomme déléguée générale, pour me présenter avec vous.Alors, je voudrais...CI-90 page 7

M. Johnson (Pierre Marc): Pour être ministre.

Mme Beaudoin (Rosemont): Oui, c'est vrai,ministre non élue. Alors, M. le Président, je voudrais poserun certain nombre de questions relativement courtes enespérant justement avoir des réponses relativement courtes,de telle sorte que pendant les 20 minutes on pourra échangersur des thèmes que je vais vous donner immédiatement,M. Johnson: bien sûr, les marchés publics, je veux revenirlà-dessus; la culture; et puis le déficit démocratique.Je vais commencer par le déficit démocratique. Jecrois qu'il est profond dans ce cas-ci. Et personnellementje le regrette beaucoup, parce que nous avons demandé...la commission d'ailleurs a demandé au gouvernementd'envoyer aux membres de cette commission, pour qu'onpuisse savoir de quoi l'on parle, un certain nombre dedocuments. On en a reçu, mais les principaux. on ne les apas reçus.Alors, le principal était bien sûr le projet d'accordle plus récent concernant tous les sujets de négociation encours, l'état de la négociation, la liste des points d'accord,de points de désaccord, bon, en tout cas, il y avait cesdocuments-là que l'on ne recevra pas.Et, si je vous dis ça, M. Johnson, c'est parce qu'aumoment de la négociation de la Zone de libre-échange desAmériques, en 2001, au moment du Sommet des Amériques,j'étais ministre des Relations internationales, et nous avionseu le document, et nous l'avions rendu public. Le gouver-nement canadien, Pierre Pettigrew, je dois dire, avait acceptéque ce document, qui était en cours de négociation, soit rendupublic. Parce que je crois, moi, sincèrement qu'au-delà desgens d'affaires la société civile a le droit de savoir ce qui sediscute et que c'est un manque de transparence puis un déficitdémocratique effectivement que je constate et que je regrette.Je vais vous dire que le dernier document que l'on a eu viala société civile, justement, parce qu'il y a eu une fuite, hein,«draft consolidated text», et c'était, je crois, au mois de févrierdernier. Il s'est passé beaucoup, beaucoup de choses depuis,on voit ça comme ça.Ce qui m'amène aussi à vous poser une sous-question: Coudon, la langue de la négociation, c'est-u quel'anglais? Parce que là je vois, là, que ce document-làétait qu'en anglais, alors qu'avec la Zone de libre-échangedes Amériques M. Pettigrew nous avait assurés que lesquatre langues des Amériques étaient utilisées, c'est-à-direl'espagnol, bien sûr, le portugais, l'anglais et le français,puis il avait fait traduire l'équivalent de ce «draft»-là.Alors donc, mes deux questions: Pourquoi on nepeut pas avoir le document, alors que, pour la ZLEA, onl'avait eu, en 2001? Et pourquoi, donc, que tout est en anglais,alors qu'il y a 14 pays qui sont membres de la francophonieen Europe? Ça ne paraît pas toujours, là, dont le plus grandet le plus important d'entre eux, bien sûr, qui est la France,mais il y en a 14 qui sont membres de la francophonie.55 pays membres de la francophonie, 14 qui sont européens,puis tout nous arrive en anglais, puis le Québec, puis leCanada, tu sais, ça devrait être au moins dans les deux languesofficielles du pays auquel nous appartenons.n (16 heures) n

Le Président (M. Drainville): M. Johnson.

M. Johnson (Pierre Marc): Alors, sur le déficitdémocratique, rapidement, il est exact que les textes dontj'ai connaissance, et dont nos équipes ont connaissance, neCI-90 page 8Débats de l'Assemblée nationalesont pas rendus publics. C'est un choix qui est fait par leséquipes de négociation de part et d'autre. Les Européensl'exigeant, et, je dirais, aussi du côté fédéral, il y a unetradition de ne pas rendre ça public très rapidement.Il faut comprendre que ce qu'on appelle le texte denégociation, c'est le texte sur la base duquel on sait qu'onva discuter dans les dernières phases de la négociation pourdire: Je te consens ça si tu me consens telle phrase, j'enlèvecelle-là si tu enlèves l'autre. Donc, la nature de ce documenttouche des contenus différents mais n'est pas nécessairement...ne signifie pas nécessairement que ce sont les positions desparties qu'on y voit. On y voit des positions, et le texte estrelativement neutre. Tant et aussi longtemps qu'on ne s'estpas entendus sur les libellés, ça demeure un texte de travail.Et c'est pour ça qu'en général les négociateurs sont extrême-ment hésitants à les faire circuler, surtout globalement. Jesais cependant par expérience que dans certains cas desextraits de texte, au fur et à mesure que la négociation avance,peuvent être rendus publics pour les fins de recueillir desopinions. Et puis, dans certains cas, il y a des gens qui fontdes ballons avec ça.Deux. Sur la langue, c'est l'Union européenne quia choisi de faire de l'anglais la langue de communicationdans cette négociation, parce qu'ils ont des équipes, je crois,qui viennent d'une quinzaine... ou 17 pays, je ne sais plus,sur un total de 27 en Europe, et la langue commune detravail de ces gens, c'est bel et bien l'anglais et non le français,comme ça l'a déjà été. Cela dit, mes conversations avecMauro Petriccione, le négociateur en chef de l'Europe, sesont toujours conduites en français et... mon italien n'étantpas tellement bon. Mais son français et son anglais étantimpeccables.

Le Président (M. Drainville): Mme la députéede Rosemont.

Mme Beaudoin (Rosemont): Oui. Bon, alors, ons'adressera à l'Union européenne en temps et lieu, maisc'est quand même étonnant, parce qu'à l'Union européennenormalement il y a un certain nombre de langues qui sontofficielles et qui sont des langues de travail, d'ailleurs, del'Union européenne, dont bien sûr le français, à la Commis-sion européenne. Mais ça ne parait pas beaucoup; je conçoisça, je comprends ça.Mais je veux quand même revenir sur cette idéeque... pourquoi la population, pourquoi la société civile nepourrait-elle pas, même si les positions justement ne sontpas arrêtées, même si les libellés ne sont pas définitifs, onsait que tout ça s'échange... Il me semble, en tout cas, quec'est le genre de chose qui fait en sorte que la population sesent de plus en plus éloignée des décisions qui se prennenten son nom derrière des portes closes dans des négociationsinternationales et que, pour la démocratie puis la vitalitédémocratique de nos sociétés, il me semble qu'on devraittous être inquiets de ces façons de faire, parce que ça éloignele citoyen, qui se sent de plus en plus impuissant et puis quin'a plus confiance ensuite dans ces institutions. En tout cas,moi, c'est ce que je constate, M. Johnson.

M. Johnson (Pierre Marc): Je suis sensible àce que vous dites, d'autant plus que j'ai commis quelquesécrits sur ces questions il y a quelques années, à l'époquedes négociations multilatérales, la participation de la sociétécivile à ces négociations. Je ne veux pas me... Je ne veux6 octobre 2010pas me cacher derrière l'aspect extraordinairement techniquede ces textes, mais c'est un fait que ces textes sont extrêmementtechniques. Deux, il y a dans ces textes parfois des ballonsà l'autre partie pour voir comment elle réagira dans laprochaine version du texte. Donc, encore une fois, ces textesne représentent pas nécessairement la position des parties,elle n'est qu'une des formes sous laquelle on voit quels sontles enjeux.Sur le plan de la consultation, par ailleurs, laconsultation est assez ouverte. Nous avons rencontré, surle plan des consultations, non seulement des entreprises,non seulement des coalitions comme la coalition culturelle,nous avons rencontré des associations industrielles, j'ai étéexposé à, je dirais, moi, une douzaine de publics depuis ledébut de cette négociation, au Québec, où j'ai eu l'occasionde tenter de répondre à des préoccupations et surtout deprendre note des priorités, des objectifs ou des craintes oudes appréhensions de beaucoup de groupes. Et je crois quele processus démocratique, il se fait plus par là. Pour lesparlementaires, il y a deux moyens: il y a celui qu'on aaujourd'hui, tout limité que soit mon couloir de révélerdes choses qui ne doivent se dire seulement qu'à une table,mais aussi, je crois que les chefs des partis de l'oppositionle savent, le premier ministre m'a autorisé à répondre àdes questions, à des personnes que désignerait l'opposition,dans un contexte qui est in camera, et je suis prêt à uneconversation peut-être un peu plus ouverte sur certainsenjeux, dans un contexte où ce n'est pas public, comme jesuis tout à fait prêt, avec l'autorisation du premier ministre,à rencontrer l'ensemble du caucus du Parti québécois oudu deuxième parti d'opposition.

Mme Beaudoin (Rosemont): Bon, très bien.

Le Président (M. Drainville): Mme la députée deRosemont.

Mme Beaudoin (Rosemont): Merci, M. le Président.Non, c'est la première fois, honnêtement, que j'entends parlerde ça, là. Alors donc, on y reviendra sûrement. Je veux quandmême dire que c'est un outil essentiel, là, dont on aurait eubesoin aujourd'hui, là, on en est restés aux textes donc dumois de février. Et je veux aussi dire, en terminant sur cesujet-là, que la question de la langue, quand même, que legouvernement du Québec, le gouvernement canadien aientaccepté cette exigence européenne sans... sans dire... sansrien dire me déçoit. Point. Bon.