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Articles interessants du texte de la commission :


Article 33

I. – L’Autorité de régulation des jeux en ligne comprend une commission des sanctions chargée de prononcer les sanctions mentionnées aux articles 35 et 36.

Cette commission des sanctions comprend 3 membres :

1° Un membre du Conseil d’État désigné par le vice-président du Conseil d’État ;

2° Un conseiller à la Cour de désigné par le premier président de la Cour de cassation ;

3° Un magistrat de la Cour des désigné par le premier président de la Cour des comptes.

Le président de la commission des sanctions est désigné par décret.

Les fonctions de membre de la commission des sanctions sont incompatibles avec celles de membre du collège.

II. – La durée du mandat des membres de la commission des sanctions est de cinq ans. Ce mandat est renouvelable une fois. La durée du mandat est décomptée à partir de la date de la première réunion de la commission. Après l’expiration de la période de cinq ans, les membres restent en fonction jusqu’à la première réunion de la commission des sanctions dans sa nouvelle composition.

En cas de vacance d’un siège de membre de la commission des sanctions pour quelque cause que ce soit, il est procédé à son remplacement pour la durée du mandat restant à courir. Un mandat exercé pendant moins de deux ans n’est pas pris en compte pour l’application de la règle de renouvellement fixée à l’alinéa précédent.

III. – Un décret en Conseil d’État fixe les modalités de renouvellement des membres de la commission des sanctions. Il peut faire exception, lors du premier renouvellement, à la règle de durée fixée au premier alinéa du II.


Article 35

I. – La commission des sanctions de l’Autorité de régulation des jeux en ligne peut prononcer, dans les conditions prévues au présent article, des sanctions à l’encontre d’un opérateur de jeux ou de paris en ligne titulaire de l’agrément prévu à l’article 16.

II. – En cas de manquement d’un opérateur de jeux ou de paris en ligne agréé aux obligations législatives et réglementaires applicables à son activité et notamment aux dispositions de l’article 4 bis, le collège de l’Autorité de régulation des jeux en ligne le met en demeure de s’y conformer dans un délai qui ne peut être inférieur à un mois ni supérieur à six mois et renouvelable une fois sauf en cas de manquement grave et répété.

Au terme du délai prévu à l’alinéa précédent, l’opérateur de jeux ou de paris en ligne qui a déféré à la mise en demeure est tenu de se soumettre dans le délai d’un mois à une nouvelle certification selon les modalités définies à l’article 17.

S’il n’y a pas déféré ou si, le cas échéant à la suite de cette nouvelle procédure de certification, les mesures correctives prises par l’opérateur sont jugées insuffisantes par le collège de l’Autorité de régulation des jeux en ligne, celui-ci peut décider l’ouverture d’une procédure de sanction. Il notifie alors les griefs aux personnes en cause et en saisit la commission des sanctions.

III. – La commission des sanctions de l’Autorité de régulation des jeux en ligne peut, avant de prononcer les sanctions prévues aux IV à VII, entendre toute personne dont l’audition lui paraît utile.

Les conditions de communication à un tiers d’une pièce mettant en jeu le secret des affaires sont définies par le décret en Conseil d’État prévu à l’article 37.

IV. – La commission des sanctions de l’Autorité peut prononcer, compte tenu de la gravité du manquement, une des sanctions suivantes :

1° L’avertissement ;

2° La réduction d’une année au maximum de la durée de l’agrément ;

3° La suspension de l’agrément pour trois mois au plus ;

4° Le retrait de l’agrément.

Le retrait de l’agrément peut s’accompagner de l’interdiction de solliciter un nouvel agrément pendant un délai maximun de trois ans.

V. – La commission des sanctions de l’Autorité peut, à la place ou en sus des sanctions prévues au IV, prononcer une sanction pécuniaire dont le montant est proportionné à la gravité du manquement, à la situation de l’opérateur en cause, à l’ampleur du dommage causé et aux avantages qui en sont tirés, sans pouvoir excéder 5 pour cent du chiffre d’affaires hors taxes du dernier exercice clos correspondant à ses activités faisant l’objet de l’agrément. Ce plafond est porté à 10 % en cas de nouveau manquement. À défaut d’activité antérieure permettant de déterminer ce plafond, le montant de la sanction ne peut excéder 150 000 €, portés à 375 000 € en cas de nouvelle violation de la même obligation.

Lorsque le manquement est constitutif d’une infraction pénale, le montant de la sanction pécuniaire ne peut excéder celui prévu pour l’amende pénale.

Lorsque la commission des sanctions de l’Autorité de régulation des jeux en ligne a prononcé une sanction pécuniaire devenue définitive avant que le juge pénal ait statué définitivement sur les mêmes faits ou des faits connexes, celui-ci peut ordonner que la sanction pécuniaire s’impute sur l’amende qu’il prononce.

VI. – Lorsqu’un opérateur agréé de jeux ou de paris en ligne communique des informations inexactes, refuse de fournir les informations demandées ou fait obstacle au déroulement de l’enquête menée par les fonctionnaires ou agents habilités en application du II de l’article 34, la commission des sanctions de l’Autorité de régulation des jeux en ligne peut, après une mise en demeure émanant du président de l'autorité ou d'un membre du personnel de l'autorité délégué à cet effet par le président, et restée infructueuse, prononcer une sanction pécuniaire d’un montant qui ne peut excéder 15 000 €.

VII. – La commission des sanctions peut en outre décider, à l’encontre des personnes physiques frappées des sanctions mentionnées aux IV à VI ci-dessus :

1° La publication de la décision prononcée au Journal officiel;

2° L’affichage ou la diffusion de cette décision dans les conditions prévues par l’article 131–35 du code pénal.


Article 36

I. – Les sanctions prévues à l’article 35 sont prononcées après que l’intéressé a reçu notification des griefs et a été mis à même de consulter le dossier et de présenter ses observations écrites ou orales. Les décisions de sanction sont motivées et notifiées à l’intéressé. Elles peuvent faire l’objet d’un recours de pleine juridiction devant la juridiction administrative.

Les sanctions pécuniaires sont recouvrées comme les créances de l’État étrangères à l’impôt et au domaine.

II. – La commission des sanctions de l’Autorité de régulation des jeux en ligne ne peut être saisie de faits remontant à plus de trois ans s’il n’a été fait aucun acte tendant à leur recherche, leur constatation ou leur sanction.



Article 50

L’Autorité de régulation des jeux en ligne adresse aux opérateurs de jeux ou de paris en ligne non autorisés en vertu d’un droit exclusif ou de l’agrément prévu à l’article 16, par tout moyen propre à en établir la date d’envoi, une mise en demeure rappelant les dispositions de l’article 47 relatives aux sanctions encourues et les dispositions du deuxième alinéa du présent article, enjoignant à ces opérateurs de respecter cette interdiction et les invitant à présenter leurs observations dans un délai de huit jours.

À l’issue de ce délai, en cas d’inexécution par l’opérateur intéressé de l’injonction de cesser son activité d’offre de paris, jeux d’argent et de hasard, l’Autorité de régulation des jeux en ligne peut, dans les conditions fixées par les articles 33 et 36, ordonner l’arrêt de l’accès à ce service aux personnes mentionnées au 2° du I et, le cas échéant, au 1° du I de l’article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique.

Dans le cas prévu au premier alinéa du présent article, l’Autorité de régulation des jeux en ligne peut également être saisie par le ministère public et toute personne physique ou morale ayant intérêt à agir. Les décisions de l’Autorité de régulation des jeux en ligne prises en application du présent article sont publiées au Journal officiel de la République Française.

Avis et rapports des commissions

Rapport de la commission des finances

Conditions du blocage de l’accès à un site illégal de paris, jeux d’argent ou de hasard

Le présent article a pour objet de fixer les modalités selon lesquelles le juge des référés pourra ordonner l’arrêt de l’accès à un service en ligne de paris, jeux d’argent ou de hasard ne disposant pas de l’agrément de l’ARJEL.

I.– LA MISE EN DEMEURE PAR L’ARJEL

Aux termes de l’alinéa 1 du présent article, l’ARJEL adressera aux « personnes responsables » (73) de sites présentant par des messages ou informations mis à disposition du public une offre de jeux d’argent ou de hasard sans être titulaire de l’agrément de l’ARJEL ou d’un droit exclusif, par tout moyen propre à établir la date d’envoi (courrier recommandé), une mise en demeure :

– rappelant les dispositions de l’article 47 du présent projet de loi c'est-à-dire les sanctions applicables à toute personne qui a offert ou proposé au public un service de communication en ligne de paris, jeux d’argent ou de hasard sans être agréé ou titulaire d’un droit exclusif ;

– enjoignant à ces personnes de respecter l’interdiction ;

– et les invitant à présenter leurs observations dans un délai de huit jours.

En pratique, c’est l’ARJEL elle-même qui décidera d’envoyer des mises en demeure. Il est peu probable que les sites légaux la saisissent, sachant que, comme toute personne ayant intérêt à agir et le ministère public, ils pourront saisir directement le juge des référés (alinéa 4 du présent article), raccourcissant ainsi la durée de la procédure aboutissant à l’arrêt des sites illégaux (74).

Cependant, l’emploi du terme « peut » dans l’alinéa 2 du présent article signifie que le président de l’ARGEL sera libre de saisir ou non le juge des référés à la suite d’une mise en demeure restée vaine. Il ne serait en effet pas opportun d’obliger l’ARJEL à engager une procédure dès qu’elle a connaissance de l’existence d’un site illégal en raison du nombre de saisines que cela pourrait entraîner. L’ARJEL doit en effet concentrer ses efforts sur les sites connaissant un volume d’activité significatif.

II.– LA SAISINE DU JUGE DES RÉFÉRÉS PAR LE PRÉSIDENT DE L’ARJEL ET TOUTE PERSONNE INTÉRESSÉE

À l’issue de ce délai de huit jours, en cas d’inexécution par la personne concernée de l’injonction de cesser son activité et lorsque ces faits constituent un trouble manifestement illicite, le Président de l’ARJEL peut, aux termes de l’alinéa 2 du présent article, saisir le juge des référés aux fins d’ordonner l’arrêt de l’accès à ce service aux personnes mentionnées au 1° ou au 2° de l’article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juillet 2004 relative à la confiance dans l’économie numérique, c'est-à-dire :

– « les personnes dont l'activité est d'offrir un accès à des services de communication au public en ligne », en d’autres termes, les fournisseurs d’accès à Internet (FAI) ;

– « les personnes physiques ou morales qui assurent, même à titre gratuit, pour mise à disposition du public par des services de communication au public en ligne, le stockage de signaux, d'écrits, d'images, de sons ou de messages de toute nature fournis par des destinataires de ces services » ; sont principalement visées par ces dispositions les fournisseurs d’hébergement de sites, les moteurs de recherche, les gestionnaires de forum ou de blogs.

En pratique, le juge des référés pourra donc ordonner tant aux fournisseurs d’accès à Internet qu’aux fournisseurs d’hébergement de sites ou aux moteurs de recherche (Google, Yahoo…) de bloquer l’accès aux sites de paris ou de jeux illégaux. Il leur transmettra une adresse à filtrer, conduisant à l’établissement d’une « liste noire » de sites de paris, jeux d’argent ou de hasard illégaux.

Le présent article réserve donc à la seule autorité judiciaire la possibilité d’ordonner aux FAI et aux hébergeurs le blocage de l’accès à un opérateur illégal.

Le Rapporteur est très favorable à cette mesure de blocage qui est de nature à protéger les sites agréés de jeux et paris d’une concurrence déloyale et ainsi, participe du bon fonctionnement du système de régulation mis en œuvre par le présent projet de loi. Certes, les FAI auditionnés par le Rapporteur ont, sans lésiner sur les détails techniques, expliqué que le contournement par les opérateurs eux-mêmes de ce blocage serait facile, voire qu’il serait impossible de mettre en œuvre un quelconque blocage dès lors que les adresses IP des sites illégaux sont mutualisées ou que ceux-ci sont hébergés par des hébergeurs dont l’activité va bien au-delà des jeux et paris en ligne. Bloquer l’accès à ces adresses ou à ces hébergeurs pourrait ainsi, selon les FAI, entraîner des dommages collatéraux importants.

Le Rapporteur estime cependant que l’obligation de résultat qui pèse sur les FAI constitue, pour ceux-ci, une incitation forte à développer les outils informatiques nécessaires pour que le blocage soit efficace et qu’à ce titre, elle doit être maintenue dans le présent projet de loi.

En revanche, il convient d’être conscient du coût que représente ce blocage pour les FAI. Similaire dans sa nature à celui que propose le projet de loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (dit LOPPSI 2) pour le blocage des sites pédopornographiques, il pourrait, comme le prévoit l’article 4 de ce dernier (qui renvoie à un décret), ouvrir droit à une compensation financière.

En outre, le Rapporteur estime qu’il serait plus efficace que l’ARJEL puisse ordonner elle-même aux FAI de bloquer l’accès aux sites illégaux. Il en va de l’efficacité même de la lutte contre l’offre illégale de paris, jeux d’argent ou de hasard en ligne qui, s’agissant de l’Internet, exige une réactivité que le juge est moins susceptible d’avoir qu’une autorité administrative.

Confier un tel pouvoir à l’ARJEL serait compatible avec l’article 12 de la directive 2000/31/CE du 8 juin 2000 relative à certains aspects juridiques de la société de l’information, qui « n’affecte pas la possibilité, pour une juridiction ou une autorité administrative, conformément aux systèmes juridiques des États-membres, d’exiger du prestataire qu’il mette un terme à une violation ou qu’il prévienne une violation ».

Il serait également compatible avec la position du Conseil constitutionnel qui, dans sa décision DC n° 2009-580 du 10 juin 2009, a jugé que la liberté de communication et d’expression énoncée à l’article 11 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen impliquait la liberté d’accéder à l’Internet. En effet :

– d’une part, les FAI, sur la demande de l’ARJEL, ne couperaient pas l’accès à Internet d’un joueur mais seulement l’accès à des sites de jeux et paris illégaux selon la loi et la réglementation françaises ;

– d’autre part, il est difficile d’assimiler l’accès à des sites de jeux et paris à la liberté constitutionnelle de communication et d’expression.

Cependant, si la jurisprudence du Conseil constitutionnel ne fait pas obstacle à ce que le Législateur puisse confier un tel pouvoir d’injonction faisant grief à une Autorité administrative indépendante (75), elle en subordonne néanmoins l’usage à de fortes garanties procédurales en matière de droit de la défense, donnant ainsi à ces Autorités toutes les caractéristiques ou presque d’une juridiction. Si un tel pouvoir d’injonction était reconnu à l’ARJEL, les sites considérés comme illégaux devront être en mesure de se défendre équitablement.


La Commission adopte l’amendement rédactionnel CF 215 du rapporteur.

Puis, elle est saisie de l’amendement CF 237 du rapporteur.

M. le rapporteur. L’ouverture du secteur des paris et jeux en ligne repose sur l’agrément d’opérateurs s’engageant à respecter de nombreuses obligations. L’ARJEL veille au respect de ces obligations et, le cas échéant, sanctionne leur violation. Elle doit donc avoir la possibilité d’imposer aux fournisseurs d’accès à Internet et aux hébergeurs de bloquer l’accès aux sites illégaux. Je précise que nous ne sommes pas du tout dans le même cas que pour le dispositif HADOPI. Les FAI, sur injonction de l’ARJEL, ne couperaient pas l’accès à Internet d’un joueur mais seulement l’accès à des sites illégaux selon la loi et la réglementation françaises. La liberté constitutionnelle de communication et d’expression que le Conseil constitutionnel a récemment rappelée n’est donc pas en cause.

M. le ministre. Le Gouvernement n’est pas favorable à cet amendement pour des raisons de sécurité juridique : il est plus sûr de passer par le juge.

M. Charles de Courson. Contrairement à ce que dit le rapporteur, les principes constitutionnels rappelés à l’occasion du vote d’un autre texte s’appliquent ici. En s’abstenant de toute décision de justice pour des affaires aussi graves, on s’expose à des contentieux.

Il est vrai que le recours à la justice implique des délais très longs. À ce propos, monsieur le ministre, la décision est-elle exécutoire, ou un éventuel appel a-t-il un effet suspensif ?

M. le ministre. La décision est exécutoire.

M. le rapporteur. Ce problème n’a rien à voir avec la décision du Conseil constitutionnel à propos de la loi HADOPI. Je le rappelle, ce n’est pas l’accès du joueur à Internet qui est bloqué, mais l’accès à un site illégal.

M. Charles de Courson. Mais en procédant à ce blocage, vous ruinez une entreprise si vous commettez une erreur.

M. le rapporteur. Des recours sont possibles : l’opérateur peut ester en justice pour demander la suspension du blocage.

J’ai l’impression qu’à chaque fois qu’il s’agit de l’Internet, on renonce à agir sous prétexte que les FAI sont réticents, que c’est difficile techniquement, etc. Le seul objet de cet amendement est de donner à l’ARJEL des pouvoirs d’injonction directs sur les fournisseurs d’accès. Je rappelle que nous parlons d’opérateurs illégaux, restés délibérément en dehors des obligations que la loi française impose à tout opérateur de paris et jeux en ligne.

La Commission adopte l’amendement.

Elle adopte ensuite l’article 50 modifié.

Avis de la commission des lois

Compétences de l’ARJEL en matière de lutte contre les sites illégaux et saisine du juge des référés

Cet article permet à l’ARJEL de saisir le juge des référés pour lui demander d’ordonner l’arrêt de l’accès à un site de jeux non agréé.

Dans l’état du droit, les hébergeurs de sites internet (44) et les fournisseurs d’accès à internet contribuent à prévenir l’offre de contenus illicites sur internet.

L’article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique prévoit que les hébergeurs doivent, s’ils sont alertés de l’existence de contenus illicites, retirer ces données ou en rendre l’accès impossible. S’ils ne le font pas, ils engagent leur responsabilité civile et pénale. L’autorité judiciaire peut prescrire à l’hébergeur ou, à défaut, au fournisseur d’accès, toutes mesures propres à prévenir ou à faire cesser un dommage occasionné par le contenu d’un site internet. Elle peut être saisie sur requête ou en référé par toute personne ayant intérêt à agir.

En outre, lorsque le contenu d’un site internet cause un trouble à l’ordre public, l’article 50 de la loi relative à la prévention de délinquance précitée a permis au ministère public de saisir le juge des référés pour demander la fermeture du site (45). Cette disposition s’applique aux sites qui incitent à commettre des atteintes à la vie, des vols, des dégradations, des actes de haines ou de violence racistes, sexistes ou homophobes, des actes de terrorisme ou des crimes et délits portant atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation, ainsi qu’aux sites faisant l’apologie des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité ou des crimes et délits de collaboration avec l’ennemi et les sites négationnistes.

Le présent article complète ces dispositions en prévoyant que l’arrêt de l’accès à un site de jeux non autorisé peut être demandé au juge des référés par l’ARJEL et par le ministère public, sans préjudice de la possibilité de saisine du juge par toute personne physique ou morale ayant intérêt à agir.

La saisine du juge des référés par l’ARJEL est subordonnée à une mise en demeure préalable de l’opérateur. L’ARJEL doit ainsi rappeler à celui-ci les sanctions pénales encourues en cas d’offre de jeux non autorisée et lui enjoindre de respecter cette interdiction. Les personnes mises en cause peuvent présenter leurs observations dans un délai de huit jours. Pour assurer le respect de ce délai, il est précisé que la mise en demeure doit être adressée par un moyen propre à en établir la date d’envoi, c’est-à-dire par courrier recommandé ou par courrier électronique. Ce n’est qu’à l’issue de ce délai de huit jours que l’ARJEL peut, si l’opérateur n’a pas déféré à l’injonction, saisir le juge des référés, à condition que l’activité du site constitue « un trouble manifestement illicite ».

Le juge des référés peut enjoindre d’arrêter l’accès au site soit à l’hébergeur de celui-ci, soit au fournisseur d’accès à internet. S’agissant des sites de jeux non autorisés, il est probable que les hébergeurs seront situés à l’étranger et que cette injonction sera le plus souvent adressée aux fournisseurs d’accès à internet.

Il est probable que certains sites internet illégaux essaieront de contourner le blocage du site initial en se créant une nouvelle adresse. Dans leur rapport de 2008 sur le monopole des jeux au regard des règles communautaires, nos collègues Émile Blessig et Jacques Myard indiquaient que « du fait de la nature décentralisée et mondiale d’un instrument tel qu’internet, il est extrêmement difficile pour un État de parvenir à bloquer indéfiniment des sites ». L’exemple italien montre que les blocages peuvent être contournés grâce à des petits programmes qui peuvent être téléchargés et qui réorientent les parieurs vers d’autres sites (46).

Toutefois, les mesures de blocage des sites constitueront une complication importante pour ces opérateurs, qui perdront à chaque fois la renommée liée à leur marque et leur travail de marketing et de publicité. Conjuguée à l’interdiction de la publicité, cette mesure est donc de nature à réduire fortement l’activité de jeux illégale.

Dans certains pays européens, le blocage des sites peut être ordonné par une décision administrative, émanant de l’autorité de régulation. Tel est le cas en Italie, par exemple, où l’Agence autonome du monopole d’État établit la liste des sites dont l’accès doit être empêché par les prestataires internet. Cette solution n’a pas été retenue par le présent projet de loi, qui réserve de telles décisions au juge pour assurer la sécurité juridique du dispositif.

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 50 sans modification.

Voir aussi la loi Jeux en ligne