PPL Surveillance internationale/Analyse : Différence entre versions

De La Quadrature du Net
Aller à la navigationAller à la recherche
Ligne 25 : Ligne 25 :
  
 
=Une surveillance massive=
 
=Une surveillance massive=
Le texte prévoit la possibilité pour les services de renseignement de collecter massivement toutes les données  
+
Le texte prévoit la possibilité pour les services de renseignement de collecter massivement toutes les données sur les systèmes de communication désignés par le Premier ministre (Art. L. 854-1 II). Toutes les données transitant sur ces systèmes de communication seront
 
Ces memes finalités permettront aux services de renseignement de mettre en place leurs techniques de surveillance et donc une écoute massive de pays entiers voire de régions entières sans aucun controle systématique.
 
Ces memes finalités permettront aux services de renseignement de mettre en place leurs techniques de surveillance et donc une écoute massive de pays entiers voire de régions entières sans aucun controle systématique.
  

Version du 14 septembre 2015 à 13:54

Introduction

En juillet 2015, le Conseil constitutionnel a validé l'ensemble de la loi sur le renseignement à l'exception de quelques dispositions dont celle, majeure, sur la surveillance internationale. Selon le Conseil constitutionnel, cette disposition, silencieuse sur les conditions d'exploitation, de conservation et de destruction des renseignements collectés ainsi que sur le contrôle par la commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR), ne comportait pas suffisamment de garanties aux citoyens.

Le 1er juillet, L'Obs publiait un article dévoilant l'existence d'un décret secret pris par Nicolas Sarkozy en 2008 et autorisant la DGSE à espionner les communications internationales transitant par les câbles sous-marins qui relient l'Europe au reste du monde. Ce décret ne reposait sur aucune base légale et La Quadrature du Net, la Fédération FDN et French Data Network (FDN) ont donc décidé de l'attaquer le 31 août devant le Conseil d’État via deux procédures, l'une en référé-suspension, et l'autre au fond. Le 9 septembre, Le Conseil d'État a signifié sa décision de rejet du référé référé, marquant ainsi sa volonté de ne pas faire du respect de la vie privée une urgence absolue.

Le 10 septembre, soit le lendemain du rejet du référé, une proposition de loi sur la surveillance internationale était déposée par deux députés. Cette proposition est en réalité issue du gouvernement, qui, pour éviter la publication d'une étude d'impact et d'une étude budgétaire, a préféré passer par le biais de la proposition de loi.

Cette proposition de loi semble très clairement avoir pour objectif de légaliser les pratiques existantes révélées par L'Obs. Le vocabulaire est intéressant car on ne parle plus d'une loi sur le renseignement, mais sur la surveillance internationale. Il s'agit bien d'une surveillance massive des communications internationales, indépendamment des menaces possibles. Et le contrôle de la CNCTR, trop faible dans le cadre du renseignement national, est quasi inexistant dans cette nouvelle proposition. Le texte omet même de mentionner la conclusion d'accords entre les différents services de renseignement de différents pays (portant sur l'échange de données de leurs citoyens respectifs par exemple), laissant un vide juridique béant sur des accords pouvant être extrêmement attentatoires au droits fondamentaux et aux libertés.

Le texte comprend deux articles uniquement, l'un afin d'ajouter un chapitre IV sur les mesures de surveillance des communications internationales au code de la sécurité intérieure, et l'autre afin de compléter le code de justice administrative.

Des finalités disproportionnées et inintelligibles

Le texte fait référence à l'article L. 811-3 du code de la sécurité intérieure, introduit par la loi sur le renseignement. La surveillance peut ainsi être autorisée "aux seules fins de la défense et de la promotion des intérêts fondamentaux de la Nation". Or ces finalités sont extrêmement larges et incluent la liste suivante :

  • La sécurité nationale ;
  • Les intérêts essentiels de la politique étrangère et l'exécution des engagements européens et internationaux de la France ;
  • Les intérêts économiques et scientifiques essentiels de la France ;
  • La prévention du terrorisme ;
  • La prévention de la reconstitution ou du maintien de groupement dissous en application de l'article L. 212-1 ;
  • La prévention de la criminalité et de la délinquance organisées ;
  • La prévention des violences collectives de nature à porter gravement atteinte à la paix publique.

Dans leur amicus curiae soumis au Conseil constitutionnel pour appuyer la saisine parlementaire sur la loi sur le renseignement, FDN, FFDN et La Quadrature du Net avaient mis en lumière l'aspect disproportionné de certaines finalités ainsi que leur inintelligibilité. Ces finalités sont toutes reprises par la proposition de loi sur la surveillance internationale, permettant une surveillance massive des communications pour chacune des finalités, légalisant ainsi toute activité de contre-espionnage, espionnage économique, mais aussi l'espionnage des organisations citoyennes, largement visées par le texte.

Une surveillance massive

Le texte prévoit la possibilité pour les services de renseignement de collecter massivement toutes les données sur les systèmes de communication désignés par le Premier ministre (Art. L. 854-1 II). Toutes les données transitant sur ces systèmes de communication seront Ces memes finalités permettront aux services de renseignement de mettre en place leurs techniques de surveillance et donc une écoute massive de pays entiers voire de régions entières sans aucun controle systématique.

Les interceptions peuvent être extremement larges puisque c'est au Premier ministre de décider quels systèmes de communication seront visés. Rien ne sera fixé dans la loi. Ces autorisations évolueront donc en fonction de l'évolution des techniques de communication, sans que les citoyens puissent avoir une vision claire des techniques qui peuvent etre mises en oeuvre par les services de renseignement. Aucune limitation de durée n'est prévue.

A des techniques extremement intrusives pour des finalités très larges, s'ajoute le fait que les autorisations portent sur l'exploitation non individualisée des données de connexion interceptées, pour une durée d'un an renouvelable (sans limite). Il n'est donc fait aucun ciblage a priori et la totalité des données de connexion (non rattachables à la France), y compris des citoyens européens, peuvent faire l'objet d'une collecte massive et d'une exploitation, sans aucun controle.

Les autorisations d'exploitation des communications et données de connexion peuvent être délivrées par zones géographique (toute l'Afrique, toute l'Amérique du Nord, toute l'Amérique du Sud), ou par organisation (toute la société X), pour une durée de 4 mois renouvelable. Il s'agit ainsi réellement d'une surveillance de masse. L'argument de la lutte contre le terrorisme ne tient pas et, au vu des trop nombreuses finalités, l'espionnage économique, le contre-espionnage, l'espionnage des organisations citoyennes sont largement visés. Contrairement aux boites noires qui sont limitées à la luttre contre le terrorisme, toutes les finalités citées sont ici valables.

L'excusion possible de certains numéros d'abonnement ou identifiants peut permettre entre autre de couvrir des agents des services de renseignement sous couverture, ou de hauts responsables politiques ou de sociétés privées dans des cas précis.

=> proposition d'amendement :

   Inclure la liste des systèmes de communication qui peuvent etre utilisés dans le cadre de la loi
   Diminuer la durée de validité des autorisations pour l'interception des données de connexion à 6 mois

Une protection insuffisante des communications rattachables au territoire national

Un contrôle limité et a posteriori