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La loi « Création et Internet » examinée au Sénat le 29 octobre 2008 vise à instaurer la « riposte graduée » recommandée par le rapport « sur la lutte contre le téléchargement illicite » rendu par Denis Olivennes, alors PDG de la FNAC, à Nicolas Sarkozy, très impliqué dans ce dossier. Elle est le fruit d'une intense et sulfureuse[1] campagne de lobbying, en France et en Europe[2], à l'instar de son ainée, la loi DADVSI, votée il y a deux ans pour répondre aux mêmes objectifs... pour un résultat nul.
 
La loi « Création et Internet » examinée au Sénat le 29 octobre 2008 vise à instaurer la « riposte graduée » recommandée par le rapport « sur la lutte contre le téléchargement illicite » rendu par Denis Olivennes, alors PDG de la FNAC, à Nicolas Sarkozy, très impliqué dans ce dossier. Elle est le fruit d'une intense et sulfureuse[1] campagne de lobbying, en France et en Europe[2], à l'instar de son ainée, la loi DADVSI, votée il y a deux ans pour répondre aux mêmes objectifs... pour un résultat nul.
  
Dans ce dispositif une autorité administrative indépendante, la HADOPI, est saisie par les représentants des ayant-droit, sur présomption d'infractions à leurs droits d'auteurs. Après enquête par recherche dans les données de connexions stockées par les fournisseurs d'accès (FAI), ce « tribunal d'exception » envoie des courriers menaçant les utilisateurs de sanction. En cas de récidive, la HADOPI  ordonne leur déconnexion d'Internet sans possibilité de reconnexion pour une durée de 3 à 12 mois[3].
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Dans ce dispositif une autorité administrative indépendante, la HADOPI, est saisie par les représentants des ayant-droit, sur présomption d'infractions à leurs droits d'auteurs. Après enquête par recherche dans les données de connexions stockées par les fournisseurs d'accès (FAI), ce « tribunal d'exception » envoie des courriers menaçant les utilisateurs de sanction. En cas de récidive, la [[Loi_Hadopi|HADOPI]] ordonne leur déconnexion d'Internet sans possibilité de reconnexion pour une durée de 3 à 12 mois[3].
  
 
===Un bénéfice économique nul... voire négatif===
 
===Un bénéfice économique nul... voire négatif===
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   terrorisme, pédo-pornographie, etc. contre lesquels les enquêteurs luttent efficacement en infiltrant les réseaux.
 
   terrorisme, pédo-pornographie, etc. contre lesquels les enquêteurs luttent efficacement en infiltrant les réseaux.
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[[Category:HADOPI_fr]]

Version actuelle datée du 9 février 2010 à 15:54

« Riposte graduée » : inefficace, inapplicable et dangereuse. V 0.82 - 20081025 – DRAFT[modifier]

La loi « Création et Internet » examinée au Sénat le 29 octobre 2008 vise à instaurer la « riposte graduée » recommandée par le rapport « sur la lutte contre le téléchargement illicite » rendu par Denis Olivennes, alors PDG de la FNAC, à Nicolas Sarkozy, très impliqué dans ce dossier. Elle est le fruit d'une intense et sulfureuse[1] campagne de lobbying, en France et en Europe[2], à l'instar de son ainée, la loi DADVSI, votée il y a deux ans pour répondre aux mêmes objectifs... pour un résultat nul.

Dans ce dispositif une autorité administrative indépendante, la HADOPI, est saisie par les représentants des ayant-droit, sur présomption d'infractions à leurs droits d'auteurs. Après enquête par recherche dans les données de connexions stockées par les fournisseurs d'accès (FAI), ce « tribunal d'exception » envoie des courriers menaçant les utilisateurs de sanction. En cas de récidive, la HADOPI ordonne leur déconnexion d'Internet sans possibilité de reconnexion pour une durée de 3 à 12 mois[3].

Un bénéfice économique nul... voire négatif[modifier]

  • Cette loi se base sur le postulat, très controversé, que les téléchargements sans autorisation seraient la cause principale, majeure, de la baisse des ventes de disques et de films[4].
  • Elle vise en réalité à faire perdurer les modèles économiques dépassés basés sur la vente de copies[5].
  • Cette loi n'apporte pas un centime de plus aux auteurs ou aux artistes[6]. Il n'est même pas démontré qu'elle fera baisser le téléchargement non autorisé. Il s'agit aux dires de Christine Albanel d'un « pari »[7].
  • Les éventuels internautes dissuadés n'iront pas pour autant acheter plus de disques et de fichiers. Cette loi n'augmentera pas leur pouvoir d'achat. Faire la guerre à ses clients n'est pas une stratégie gagnante.
  • Le cout de l'HADOPI pour le contribuable est exorbitant : 6,7M€/an budgetés[8] auxquels s'ajouteront des millions de frais d'identification[9] et d'envoi de courriers électroniques[10].

Une inefficacité technique chronique pour un texte juridiquement inapplicable[modifier]

  • De nombreux moyens techniques d'échapper au dispositif existent déjà[11], seront connus de tous et très largement publicisés. Seuls les innocents et les utilisateurs les moins éduqués à la technique seront sanctionnés.
  • Des innocents seront condamnés[12]. Les procédures de l'HADOPI sont initiées sur la base de relevés d'adresses IP. Ces « preuves immatérielles » sont loin d'être irréfragables[13].
  • Le texte propose donc de ne plus se baser sur la présomption de contrefaçon mais sur une nouvelle infraction de « défaut de sécurisation de sa connexion ». Prétendre qu'il est possible pour le Ministère de la Culture de gérer ainsi la sécurité de millions de Français en maintenant à jour une liste d'outils de sécurisation, et qu'il serait possible de prouver sa bonne foi dans leur mise en œuvre relève de la méconnaissance la plus élémentaire de l'environnement numérique et des principes de sécurité informatique ainsi que du mépris de l'ensemble des personnes dans le monde travaillant dans la sécurité informatique et qui n'ont, à ce jour, jamais prétendu proposer une solution utopique, contrairement à l'HADOPI.

Une sanction disproportionnée aux conséquences sociales et humaines désastreuses[modifier]

  • La coupure d'accès à internet est une sorte de « mort sociale électronique »[14] :
    • des demandeurs d'emploi, télé-travailleurs, personnes isolées ou invalides privés d'accès.
    • Internet aujourd'hui permet de faire bien d'autre chose que simplement consulter des pages web :
      • Il est possible de faire du travail collaboratif
      • Il est possible d'avoir accès à de nombreux services (administratifs ou non) en ligne comme l'accès à légifrance afin de connaitre nos droits, prendre connaissance du journal officiel, l'accès aux sites du sénat, de l'assemblé nationale, des différents ministères, préfectures ou mairies. L'accès permet également la possibilité de déclarer ses impôts en ligne ainsi que la possibilité de rechercher et de postuler pour un emploi etc. La perte d'un connexion internet induit une perte d'autonomie ainsi qu'une exclusion à l'encontre des personnes loin des centres villes.
      • Internet permet également de faire des achats et ligne, accès aux comparateurs de prix, accès à un information importante du consommateur via les associations de comsomateurs, les moteurs de recherche, ou grâce à la possibilité d'entrer en contact rapidement et de manière efficace avec d'autres personnes ayant les mêmes besoins. Par conséquent, couper un accès Internet (tout en continuant les prélèvement d'argent) est une attaque au pouvoir d'achat des abonnés.
      • Apprentissage à distance, possibilité d'accès facilité à la culture même pour les personnes loin des centres culturels, accès à la connaissance (moteurs de recherches, encyclopédies en ligne). La suspension d'un abonnement induit également une hausse des inégalités d'accès à la culture, à la connaissance et à l'information.
      • Lien social : Perte de la messagerie instantanée, perte de la possibilité d'envoyer des courriers électroniques, impossibilité de se rendre sur des forums ou des salons de discution... Perte de connexion internet=perte du lien social
  • risque de double peine : l' infraction de « non-sécurisation de l'accès » pourra s'ajouter à des poursuites pour contrefaçon.

De graves questions de respect des libertés individuelles sur Internet[modifier]

  • Le Parlement Européen a rappelé[15] par un amendement voté par 88% de ses membres que seule l'autorité judiciaire est à même de restreindre les droits et libertés fondamentales[16] des internautes[17].
  • La HADOPI peut accéder à toutes les données de connexion d'internautes stockées par les FAI, sans contrôle de l'autorité judiciaire. Ce pouvoir d'exception n'existe temporairement que pour les unités anti-terroristes[18].
  • La généralisation d'outils d'anonymisation et de chiffrement des connexions pour contourner HADOPI rendra plus difficile le travail des forces de l'ordre enquêtant sur des crimes et délits sérieux[19].
  • L'article 5 portant sur la mise en place de dispositifs de filtrage des contenus au nom du droit d'auteur pose d'essentielles questions de respect de la liberté d'expression.

notes[modifier]

[1]

  Lire à ce titre le billet de Philippe Aigrain : « Préparation de la décision politique : le trop-plein de corruption » :
  http://paigrain.debatpublic.net/?p=158

[2]

  Excédée par le lobbying excessif des représentants du cinéma français, la commissionnaire Viviane Reding, qui leur était
  pourtant très favorable, a décidé de ne pas se rendre cette année aux rencontres de Dijon, comme expliqué dans cette lettre
  au président de l'ARP : « C'est donc à mon grand regret, que j'ai dû constater au cours des dernières semaines, que le
  secteur culturel avait lancé un débat agité et parfois polémique avec pour objectif d'inclure, dans le 'paquet telecom'
  discuté en ce moment par les institutions communautaires, une sorte de légalisation européenne de la 'riposte graduée'
  sur le modèle de celle actuellement en discussion en France. » http://www.lefigaro.fr/assets/pdf/reding.pdf

[3]

  Durant cette période, les utilisateurs devront continuer à payer leur connexion. Les frais de déconnexion seront à leur
  charge, et un éventuel recours en cours d'appel, que l'on imagine couteux, ne sera pas suspensif de la décision. Une « liste
  noire » des utilisateurs déconnectés sera tenue par la HADOPI, des sanctions sont prévues pour les opérateurs qui ne la
  respecteraient pas.

[4]

  Les causes de la crise de l'industrie du disque sont multiples : éléments structurels, baisse du pouvoir d'achat,
  multiplication des postes de dépenses de loisir (DVD, jeux vidéos, téléphonie mobile, etc.), prix excessifs n'ayant
  pas baissé en 20 ans pour le CD, impact négatif des DRM sur le comportement des consommateurs qui hésitent à investir
  pour l'acquisition de produits dont l'utilisation est restreinte et peut être perdue (changement de pc, ...).
  L'importance relative de ces différents facteurs était chiffrées dans une étude de la FNAC en
  2004, dans laquelle le téléchargement ne comptait que pour une part mineure.
  De nombreuses études concluent également en un impact limité, voire positif pour les artistes les moins connus, des
  téléchargements sans autorisation : http://www.laquadrature.net/wiki/Documents (Par ailleurs, le spectacle vivant et la
  fréquentation des salles de cinéma explosent littéralement depuis quelques années en France.)

[5]

  Pour Paul Krugman, dernier prix nobel d'économie, le modèle de vente de fichiers est sans avenir :
   http://www.nytimes.com/2008/06/06/opinion/06krugman.html?_r=1&oref=slogin

[6]

  Il existe d'autres solutions, apportant des rémunérations complémentaires pour les artistes sans porter atteinte aux
  principes fondamentaux de notre démocratie. Voir le livre « Internet et Création » de Philippe Aigrain à ce sujet :
  http://www.ilv-edition.com/librairie/internet_et_creation.html

[7]

  « Notre pari, c'est que ce système d'avertissements déclenche dans l'immense majorité des cas une prise de conscience,
  une responsabilisation de l'abonné » http://www.ecrans.fr/Christine-Albanel-On-sort-d-une,4448.html

[8]

  Pour comparaison, le budget annoncé pour le contrôleur général des lieux de privation de liberté est de 2.5 millions
  d'euros pour 5800 lieux à contrôler, et la CNIL dispose d'un budget de 11.3M d'euros pour contrôler l'ensemble des
  traitements de données personnelles réalisées en France, soit trois fois moins que celui de son homologue allemand...

[9]

  L'identification d'utilisateurs par les fournisseurs d'accès à internet est habituellement facturé par les FAI à l'autorité
  judiciaire. http://www.arcep.fr/index.php?id=2095

[10]

  Christine Albanel parle de « 3 000 lettres recommandées d'avertissement par jour » envoyées aux internautes. Au
  tarif public en vigueur (1 page vers la France avec avis de réception : 6.29 euros.), le seul envoi de lettres représenterait
  6,89M d'euros par an, soit plus que les 6.7M d'euros budgetés pour l'ensemble d'HADOPI.

[11]

  Serveurs relais situés dans d'autres pays, logiciels d'anonymisation et de chiffrement des connexions, injections de fausses
  données dans les outils de surveillance des réseaux, etc.

[12]

  Des chercheurs en sécurité informatique ont d'ores et déjà prouvé qu'il était possible de leurrer ces dispositifs en leur
  injectant de fausses adresses IP (Internet Protocol), en recevant une plainte pour contrefaçon destinée à deux imprimantes
  de leur laboratoire connectées en réseau : http://dmca.cs.washington.edu/uwcse_dmca_tr.pdf
  Par ailleurs des réseaux d'échanges peer to peer, ont déjà prévu d'inonder le réseaux d'adresses IP aléatoire n'ayant pas (forcément)
 effectué de téléchargement, ce qui rend donc dangereux la présomption de culpabilité portée par le texte.

[13]

  Ces adresses IP identifient en général les points d'accès à internet soupçonnés d'avoir servi à télécharger à un instant
  donné (ils peuvent être partagés entre de nombreux ordinateurs d'un même foyer, d'une même entreprise, des clients d'un
  établissement offrant ce service, entre les visiteurs des nombreux jardins et lieux publics offrant un accès wifi, etc.). Plus
  rarement, ces adresses IP identifient un ordinateur en particulier, mais jamais les utilisateurs du réseau eux-mêmes.

[14]

  le communiqué conjoint des ministres suédois de la Culture Lena Adelsohn Liljeroth et de la Justice Beatrice Ask dans
  une tribune publiée dans Svenska Dagbladet rejete totalement l'idée même de sanctions de coupure d'abonnement à
  internet (sans même parler de fichiers d'interdiction d'accès).: « La proposition dans le rapport Renfors de donner aux
  FAI le droit et l'obligation de couper les abonnements à internet des internautes dont la connexion a été utilisée de façon
  répétée pour des violations du copyright a été fortement critiquée. Beaucoup ont noté que la coupure d'un abonnement à
  Internet est un sanction aux effets puissants qui pourrait avoir des répercussions graves dans une société où l'accès à
  internet est un droit impératif pour l'inclusion sociale. Le gouvernement a donc décidé de ne pas suivre cette
  proposition. » Les ministres ont également écrit que « les lois sur le copyright ne doivent pas être utilisées pour défendre
  de vieux modèles commerciaux ».

[15]

  Amendement 138 au rapport Trautmann modifiant la directive « Communications électroniques: cadre réglementaire
  commun pour les réseaux et services, accès, interconnexion et autorisation ("Paquet Télécom" [modif. directives 2002/19/
  CE à 2002/21/CE]) ».. Après le vote, la rapporteur C. Trautmann déclarait : « s'il s'avère que la riposte graduée va à
  l'encontre du principe fondamental que nous [les eurodéputés] n'avons fait que rappeler, il faut s'interroger sur la
  viabilité même du système » http://www.liberation.fr/medias/010132148-riposte-graduee-la-claque

[16]

  Notamment les libertés de communication, d'information et la liberté d'expression.

[17]

  N. Sarkozy a lui-même affirmé, dans une lettre à J. M. Barroso lui demandant de le retirer, que cet amendement 138
  empêche la mise en œuvre de l'HADOPI. La Commission a cependant confirmé la position du Parlement européen (21
  octobre 2008) http://www.ecrans.fr/Europe-La-Commission-accepte-l,5489.html

[18]

  Accéder, sans contrôle de l'autorité judiciaire, à toutes ces données personnelles stockées n'est possible actuellement que
  pour certaines unités de lutte anti- terrorisme, à titre dérogatoire jusque fin 2008.

[19]

  terrorisme, pédo-pornographie, etc. contre lesquels les enquêteurs luttent efficacement en infiltrant les réseaux.