JeanPierreBrard : Différence entre versions

De La Quadrature du Net
Aller à la navigationAller à la recherche
Ligne 74 : Ligne 74 :
 
===== 12/03/2009 [http://www.assemblee-nationale.fr/13/cri/2008-2009/20090193.asp Débats HADOPI : gestapo, procédures de l'AN, avis CNIL, HADOPI représentant de la France dans les organisations internationales ] =====
 
===== 12/03/2009 [http://www.assemblee-nationale.fr/13/cri/2008-2009/20090193.asp Débats HADOPI : gestapo, procédures de l'AN, avis CNIL, HADOPI représentant de la France dans les organisations internationales ] =====
  
<blockquote>Monsieur le président, cet après-midi, vous vous êtes comporté à mon égard avec une grossièreté que je n’ai jamais constatée dans cet hémicycle depuis plus de vingt ans que je m’honore de la confiance de mes concitoyens. Aux lettres de cachet de Mme la ministre, vous avez ajouté le bâillon.</blockquote>
+
<blockquote>Monsieur le président, cet après-midi, vous vous êtes comporté à mon égard avec une grossièreté que je n'ai jamais constatée dans cet hémicycle depuis plus de vingt ans que je m'honore de la confiance de mes concitoyens. Aux lettres de cachet de Mme la ministre, vous avez ajouté le bâillon.</blockquote>
  
<blockquote>Cette assemblée est régie par des règles que vous avez bafouées. D’ordinaire, on laisse les députés s’exprimer, surtout au cours d’un débat d’une telle importance. En m’empêchant de prendre la parole avant le vote d’un amendement, ce n’est pas seulement moi que vous avez agressé, ce sont les personnes que nous défendons ici, qu’il s’agisse des internautes ou de celles et ceux que nous représentons.</blockquote>
+
<blockquote>Cette assemblée est régie par des règles que vous avez bafouées. D'ordinaire, on laisse les députés s'exprimer, surtout au cours d'un débat d'une telle importance. En m'empêchant de prendre la parole avant le vote d'un amendement, ce n'est pas seulement moi que vous avez agressé, ce sont les personnes que nous défendons ici, qu'il s'agisse des internautes ou de celles et ceux que nous représentons.</blockquote>
  
<blockquote>Au-delà de ma personne – nous vous connaissons : des incidents-limite ont déjà eu lieu cet après-midi à l’égard de nos collègues socialistes –, votre comportement déshonore, et je pèse mes mots, la fonction que vous exercez. Bien sûr, un tel incident ne saurait se répéter, mais le seul fait qu’il se soit produit est déjà indécent.</blockquote>
+
<blockquote>Au-delà de ma personne – nous vous connaissons : des incidents-limite ont déjà eu lieu cet après-midi à l'égard de nos collègues socialistes –, votre comportement déshonore, et je pèse mes mots, la fonction que vous exercez. Bien sûr, un tel incident ne saurait se répéter, mais le seul fait qu'il se soit produit est déjà indécent.</blockquote>
  
<blockquote>Pour ce qui me concerne, je ne suis pas prêt à l’accepter. Je demande donc une suspension de séance.</blockquote>
+
<blockquote>Pour ce qui me concerne, je ne suis pas prêt à l'accepter. Je demande donc une suspension de séance.</blockquote>
  
 
<blockquote>[...]</blockquote>
 
<blockquote>[...]</blockquote>
  
<blockquote>Monsieur le président, vous récrivez l’histoire. Évidemment, vous êtes gêné, parce que vous vous rendez compte que vous avez commis une bévue, tout à l’heure, à vingt heures dix. C’est votre faute si nous sommes allés jusqu’à cette heure. Nos collègues Christian Paul et Patrick Bloche avaient demandé que la séance soit levée plus tôt, précisément pour ne pas faire les choses à la va-vite.</blockquote>
+
<blockquote>Monsieur le président, vous récrivez l'histoire. Évidemment, vous êtes gêné, parce que vous vous rendez compte que vous avez commis une bévue, tout à l'heure, à vingt heures dix. C'est votre faute si nous sommes allés jusqu'à cette heure. Nos collègues Christian Paul et Patrick Bloche avaient demandé que la séance soit levée plus tôt, précisément pour ne pas faire les choses à la va-vite.</blockquote>
  
<blockquote>Vous avez fait un autre choix. C’est exclusivement à vous qu’il appartenait d’en décider. À la limite, je dirai que nous n’avons pas à avoir d’opinion sur ce point.</blockquote>
+
<blockquote>Vous avez fait un autre choix. C'est exclusivement à vous qu'il appartenait d'en décider. À la limite, je dirai que nous n'avons pas à avoir d'opinion sur ce point.</blockquote>
  
<blockquote>Ce qui a été à l’origine de l’incident, et dont vous êtes seul responsable, c’est que lorsque, après que nos collègues se sont exprimés, j’ai demandé la parole, au nom du groupe GDR, vous me l’avez refusée d’une façon complètement arbitraire, avant le vote, et alors même qu’il s’agissait d’un débat où les positions sont très opposées et très identitaires.</blockquote>
+
<blockquote>Ce qui a été à l'origine de l'incident, et dont vous êtes seul responsable, c'est que lorsque, après que nos collègues se sont exprimés, j'ai demandé la parole, au nom du groupe GDR, vous me l'avez refusée d'une façon complètement arbitraire, avant le vote, et alors même qu'il s'agissait d'un débat où les positions sont très opposées et très identitaires.</blockquote>
  
<blockquote>Est-ce une bévue, un faux-pas ? Peu importe. Que vous le vouliez ou non, le résultat est le même : alors que votre position doit être obligatoirement une position de neutralité, parce qu’ainsi le veut notre règlement, et parce que c’est ainsi que le débat fonctionne bien, vous m’avez privé de la parole au moment où nous sommes en pleine confrontation avec le Gouvernement. Vous êtes ainsi apparu, à tort ou à raison, comme manipulant le bâillon au moment où je voulais répondre au Gouvernement. C’est inacceptable, pour les raisons que j’ai dites tout à l’heure.</blockquote>
+
<blockquote>Est-ce une bévue, un faux-pas ? Peu importe. Que vous le vouliez ou non, le résultat est le même : alors que votre position doit être obligatoirement une position de neutralité, parce qu'ainsi le veut notre règlement, et parce que c'est ainsi que le débat fonctionne bien, vous m'avez privé de la parole au moment où nous sommes en pleine confrontation avec le Gouvernement. Vous êtes ainsi apparu, à tort ou à raison, comme manipulant le bâillon au moment où je voulais répondre au Gouvernement. C'est inacceptable, pour les raisons que j'ai dites tout à l'heure.</blockquote>
  
<blockquote>Comme tous mes collègues, je représente des points de vue et je représente nos concitoyens. Nous sommes des élus de la nation. Et le président doit veiller à l’équité dans le débat. Vous n’avez pas été équitable, et vous le savez. C’est l’opinion qui s’exprimait tout à l’heure dans les couloirs, une opinion partagée par nos collègues.</blockquote>
+
<blockquote>Comme tous mes collègues, je représente des points de vue et je représente nos concitoyens. Nous sommes des élus de la nation. Et le président doit veiller à l'équité dans le débat. Vous n'avez pas été équitable, et vous le savez. C'est l'opinion qui s'exprimait tout à l'heure dans les couloirs, une opinion partagée par nos collègues.</blockquote>
  
<blockquote>Ne récrivez pas l’histoire, comme vous venez de le faire à propos de la suspension de séance. Cette demande de suspension de séance n’était que l’écho de votre comportement à vingt heures dix.</blockquote>
+
<blockquote>Ne récrivez pas l'histoire, comme vous venez de le faire à propos de la suspension de séance. Cette demande de suspension de séance n'était que l'écho de votre comportement à vingt heures dix.</blockquote>
  
<blockquote>Si vous voulez que le débat se déroule convenablement – ce que nous souhaitons tous, sauf vous, peut-être –, il faut que vous nous disiez comment vous avez pu ainsi me priver de la parole tout à l’heure.</blockquote>
+
<blockquote>Si vous voulez que le débat se déroule convenablement – ce que nous souhaitons tous, sauf vous, peut-être –, il faut que vous nous disiez comment vous avez pu ainsi me priver de la parole tout à l'heure.</blockquote>
  
<blockquote>Monsieur le président, je suis prêt à arrêter cette confrontation de procédure. Mais vous m’avez privé de la parole. Vous avez appelé le vote en me refusant la parole. Il peut arriver, au perchoir, que l’on ne voie pas un orateur qui demande à s’exprimer. Notre collègue Patrick Bloche a fort bien expliqué cet après-midi comment le champ visuel peut se rétrécir. Mais ce n’est pas ce qui s’est produit tout à l’heure. Vous m’avez explicitement refusé la parole. Et ce n’est pas acceptable.</blockquote>
+
<blockquote>Monsieur le président, je suis prêt à arrêter cette confrontation de procédure. Mais vous m'avez privé de la parole. Vous avez appelé le vote en me refusant la parole. Il peut arriver, au perchoir, que l'on ne voie pas un orateur qui demande à s'exprimer. Notre collègue Patrick Bloche a fort bien expliqué cet après-midi comment le champ visuel peut se rétrécir. Mais ce n'est pas ce qui s'est produit tout à l'heure. Vous m'avez explicitement refusé la parole. Et ce n'est pas acceptable.</blockquote>
  
<blockquote>Oh, moi, je suis prêt à pardonner, je suis prêt à tout ce que vous voulez, à condition que le président reconnaisse au moins qu’il m’a privé de la parole, ce qu’il ne dit même pas, pour l’instant.</blockquote>
+
<blockquote>Oh, moi, je suis prêt à pardonner, je suis prêt à tout ce que vous voulez, à condition que le président reconnaisse au moins qu'il m'a privé de la parole, ce qu'il ne dit même pas, pour l'instant.</blockquote>
  
<blockquote>Vous n’avez pas bien compris, monsieur le président. Est-ce que vous garantissez un déroulement normal du débat, ce soir ?</blockquote>
+
<blockquote>Vous n'avez pas bien compris, monsieur le président. Est-ce que vous garantissez un déroulement normal du débat, ce soir ?</blockquote>
  
 
<blockquote>Monsieur le président, est-ce que je peux conclure de ce que vous venez de dire que vous vous engagez à ne pas renouveler le comportement qui a été le vôtre à la fin de la séance de cet après-midi ?</blockquote>
 
<blockquote>Monsieur le président, est-ce que je peux conclure de ce que vous venez de dire que vous vous engagez à ne pas renouveler le comportement qui a été le vôtre à la fin de la séance de cet après-midi ?</blockquote>
  
<blockquote>J’en prends acte, et j’interprète cela comme des excuses publiques.</blockquote>
+
<blockquote>J'en prends acte, et j'interprète cela comme des excuses publiques.</blockquote>
  
 
<blockquote>[...]</blockquote>
 
<blockquote>[...]</blockquote>
Ligne 112 : Ligne 112 :
 
<blockquote>Monsieur le président, madame la ministre, il est utile de retrouver la sérénité.</blockquote>
 
<blockquote>Monsieur le président, madame la ministre, il est utile de retrouver la sérénité.</blockquote>
  
<blockquote>Monsieur le président de la commission, les excès ont été commis par Mme la ministre. Personne d’autre qu’elle, ici, n’a fait référence à la police politique hitlérienne.</blockquote>
+
<blockquote>Monsieur le président de la commission, les excès ont été commis par Mme la ministre. Personne d'autre qu'elle, ici, n'a fait référence à la police politique hitlérienne.</blockquote>
  
 
<blockquote>Il peut arriver que la langue fourche, mais le dérapage verbal a au moins une fonction.</blockquote>
 
<blockquote>Il peut arriver que la langue fourche, mais le dérapage verbal a au moins une fonction.</blockquote>
  
<blockquote>L’excès de la parole ministérielle, disais-je, aussi malheureux fût-il, a au moins une fonction. Il permet de déplacer le débat et de discréditer ceux qui contestent la position gouvernementale, en faisant passer cette contestation pour excessive. Ce n’est pas convenable. </blockquote>
+
<blockquote>L'excès de la parole ministérielle, disais-je, aussi malheureux fût-il, a au moins une fonction. Il permet de déplacer le débat et de discréditer ceux qui contestent la position gouvernementale, en faisant passer cette contestation pour excessive. Ce n'est pas convenable. </blockquote>
  
<blockquote>Revenons au fond. Nous n’avons pas l’intention de vous convaincre. Nous savons bien que vous êtes en service commandé. Nous nous adressons à nos collègues et plus encore à ceux qui nous regardent et qui doivent savoir la vérité.</blockquote>
+
<blockquote>Revenons au fond. Nous n'avons pas l'intention de vous convaincre. Nous savons bien que vous êtes en service commandé. Nous nous adressons à nos collègues et plus encore à ceux qui nous regardent et qui doivent savoir la vérité.</blockquote>
  
<blockquote>Nous considérons que votre texte – nous l’avons démontré – est une atteinte insupportable aux libertés. Soyons concrets. Notre collègue Martine Billard a cité des exemples. Pensons à un jeune de dix-neuf ans ou à une personne âgée de quatre-vingt-cinq ans qui se retrouveront confrontés à vos fameuses lettres recommandées. Ils ne sauront pas comment réagir. Les choses vont empirer.</blockquote>
+
<blockquote>Nous considérons que votre texte – nous l'avons démontré – est une atteinte insupportable aux libertés. Soyons concrets. Notre collègue Martine Billard a cité des exemples. Pensons à un jeune de dix-neuf ans ou à une personne âgée de quatre-vingt-cinq ans qui se retrouveront confrontés à vos fameuses lettres recommandées. Ils ne sauront pas comment réagir. Les choses vont empirer.</blockquote>
  
<blockquote>Vous ajoutez à cela le renversement de la charge de la preuve, qui est heureusement, dans notre droit, une disposition d’exception. C’est à la personne qui est accusée de prouver qu’elle n’a pas fraudé.</blockquote>
+
<blockquote>Vous ajoutez à cela le renversement de la charge de la preuve, qui est heureusement, dans notre droit, une disposition d'exception. C'est à la personne qui est accusée de prouver qu'elle n'a pas fraudé.</blockquote>
  
<blockquote>Je vais raisonner par analogie pour me faire comprendre. Quand vous êtes accusé par l’administration fiscale d’avoir donné un dessous de table sur la base duquel vous êtes taxé, alors même que ce n’est pas vrai, comment pouvez-vous faire la démonstration que vous n’avez rien donné ? C’est impossible. C’est le règne de l’arbitraire total.</blockquote>
+
<blockquote>Je vais raisonner par analogie pour me faire comprendre. Quand vous êtes accusé par l'administration fiscale d'avoir donné un dessous de table sur la base duquel vous êtes taxé, alors même que ce n'est pas vrai, comment pouvez-vous faire la démonstration que vous n'avez rien donné ? C'est impossible. C'est le règne de l'arbitraire total.</blockquote>
  
<blockquote>Tout à l’heure, monsieur le rapporteur, vous faisiez référence à un avis très ancien de la CNIL, comme si 2008 était si loin de nous !</blockquote>
+
<blockquote>Tout à l'heure, monsieur le rapporteur, vous faisiez référence à un avis très ancien de la CNIL, comme si 2008 était si loin de nous !</blockquote>
  
<blockquote>Très ancien ! Le Sénat a adopté le texte à la fin du mois d’octobre. Ce n’est pas ancien, c’est très actuel. Et cela éclaire notre débat.</blockquote>
+
<blockquote>Très ancien ! Le Sénat a adopté le texte à la fin du mois d'octobre. Ce n'est pas ancien, c'est très actuel. Et cela éclaire notre débat.</blockquote>
  
<blockquote>L’avis de la CNIL est accablant. Monsieur le rapporteur, le poids de vos notes pour forger votre réflexion est certainement très important mais, en termes législatifs, cela ne vaut rien.</blockquote>
+
<blockquote>L'avis de la CNIL est accablant. Monsieur le rapporteur, le poids de vos notes pour forger votre réflexion est certainement très important mais, en termes législatifs, cela ne vaut rien.</blockquote>
  
<blockquote>Seule la note de la CNIL vaut quelque chose. Celle-ci nous a été partiellement lue par Christian Paul. C’est un véritable réquisitoire, qui montre à quel point votre loi est attentatoire aux libertés.</blockquote>
+
<blockquote>Seule la note de la CNIL vaut quelque chose. Celle-ci nous a été partiellement lue par Christian Paul. C'est un véritable réquisitoire, qui montre à quel point votre loi est attentatoire aux libertés.</blockquote>
  
<blockquote>Vous avez dit, monsieur le rapporteur, qu’il y aurait des amendements pour « perfectionner ». Mais on ne perfectionne pas ce qui est liberticide. On y renonce ou on le confirme.</blockquote>
+
<blockquote>Vous avez dit, monsieur le rapporteur, qu'il y aurait des amendements pour « perfectionner ». Mais on ne perfectionne pas ce qui est liberticide. On y renonce ou on le confirme.</blockquote>
  
 
<blockquote>Le fait que vous mettiez un peu de miel autour ne change rien à la perversion du texte.</blockquote>
 
<blockquote>Le fait que vous mettiez un peu de miel autour ne change rien à la perversion du texte.</blockquote>
Ligne 140 : Ligne 140 :
 
<blockquote>Tout cela confirme la cohérence de votre politique et la dérive monarchique et autoritaire du régime.</blockquote>
 
<blockquote>Tout cela confirme la cohérence de votre politique et la dérive monarchique et autoritaire du régime.</blockquote>
  
<blockquote>Il y a eu la loi sur l’audiovisuel, où l’on a bâillonné les médias. Il y a la loi sur le règlement de l’Assemblée avec l’affaire du temps de parole, qui va dans le même sens. Maintenant, on bâillonne les internautes. C’est la dérive autoritaire du régime. Il est très important que les personnes qui nous regardent aujourd’hui comprennent bien la cohérence de votre politique. Il n’y a pas de hasard. C’est construit. Le grand organisateur réside au palais de l’Élysée, les ministres ne sont que les exécutants puisque, la plupart du temps, ils apprennent par les médias les textes qu’ils devront défendre ou les décisions qu’ils devront prendre, même quand ils ne sont pas d’accord avec elles.</blockquote>
+
<blockquote>Il y a eu la loi sur l'audiovisuel, où l'on a bâillonné les médias. Il y a la loi sur le règlement de l'Assemblée avec l'affaire du temps de parole, qui va dans le même sens. Maintenant, on bâillonne les internautes. C'est la dérive autoritaire du régime. Il est très important que les personnes qui nous regardent aujourd'hui comprennent bien la cohérence de votre politique. Il n'y a pas de hasard. C'est construit. Le grand organisateur réside au palais de l'Élysée, les ministres ne sont que les exécutants puisque, la plupart du temps, ils apprennent par les médias les textes qu'ils devront défendre ou les décisions qu'ils devront prendre, même quand ils ne sont pas d'accord avec elles.</blockquote>
  
 
<blockquote>[...]</blockquote>
 
<blockquote>[...]</blockquote>
Ligne 146 : Ligne 146 :
 
<blockquote>M. le rapporteur a beau être jeune, il manie la langue de bois comme un vieux politicien !</blockquote>
 
<blockquote>M. le rapporteur a beau être jeune, il manie la langue de bois comme un vieux politicien !</blockquote>
  
<blockquote>Décodons son propos, pour ceux qui nous regardent : sur le fond, il est d’accord, mais il ne faut surtout pas adopter l’amendement ! Or, d’une certaine façon, l’amendement de M. Martin-Lalande vise à combattre la prohibition. Chacun sait que la retenue et la prohibition ouvrent le terrain aux trafiquants, comme au temps d’Al Capone pour l’alcool. Certes, comparaison n’est pas raison, mais le système est similaire. Dès lors, M. Martin-Lalande est très bien avisé de favoriser la fluidité afin que les internautes aient accès dans de meilleures conditions aux produits qui leur sont offerts.</blockquote>
+
<blockquote>Décodons son propos, pour ceux qui nous regardent : sur le fond, il est d'accord, mais il ne faut surtout pas adopter l'amendement ! Or, d'une certaine façon, l'amendement de M. Martin-Lalande vise à combattre la prohibition. Chacun sait que la retenue et la prohibition ouvrent le terrain aux trafiquants, comme au temps d'Al Capone pour l'alcool. Certes, comparaison n'est pas raison, mais le système est similaire. Dès lors, M. Martin-Lalande est très bien avisé de favoriser la fluidité afin que les internautes aient accès dans de meilleures conditions aux produits qui leur sont offerts.</blockquote>
  
<blockquote>En vous écoutant, monsieur le rapporteur et madame la ministre, je me demande quelles sont vos marges d’appréciation réelles. Qu’est-ce que les arbitrages rendus par Matignon et surtout l’Élysée vous donnent l’autorisation d’accepter ? Nous gagnerions beaucoup de temps si vous nous disiez d’emblée que vous n’avez aucune marge et que tous les amendements seront refusés. Cela ne nous empêchera d’ailleurs pas de les défendre, mais au moins n’aurez-vous pas à répondre à chaque fois en langue de bois pour nous dire que, malgré l’intérêt qu’ils suscitent en vous, vous réprouvez leur adoption.</blockquote>
+
<blockquote>En vous écoutant, monsieur le rapporteur et madame la ministre, je me demande quelles sont vos marges d'appréciation réelles. Qu'est-ce que les arbitrages rendus par Matignon et surtout l'Élysée vous donnent l'autorisation d'accepter ? Nous gagnerions beaucoup de temps si vous nous disiez d'emblée que vous n'avez aucune marge et que tous les amendements seront refusés. Cela ne nous empêchera d'ailleurs pas de les défendre, mais au moins n'aurez-vous pas à répondre à chaque fois en langue de bois pour nous dire que, malgré l'intérêt qu'ils suscitent en vous, vous réprouvez leur adoption.</blockquote>
  
<blockquote>Je constate que M. Dionis du Séjour, qui est lui aussi un député très expérimenté, partage mon opinion – ce qui n’est pas toujours le cas, puisque nous ne siégeons pas sur les mêmes bancs.</blockquote>
+
<blockquote>Je constate que M. Dionis du Séjour, qui est lui aussi un député très expérimenté, partage mon opinion – ce qui n'est pas toujours le cas, puisque nous ne siégeons pas sur les mêmes bancs.</blockquote>
  
<blockquote>Nous sommes de connivence. Si d’aventure M. Martin-Lalande renonçait à son amendement, il va de soi que je le reprendrais !</blockquote>
+
<blockquote>Nous sommes de connivence. Si d'aventure M. Martin-Lalande renonçait à son amendement, il va de soi que je le reprendrais !</blockquote>
  
 
<blockquote>[...]</blockquote>
 
<blockquote>[...]</blockquote>
  
<blockquote>C’est le début de la sagesse, mais ce n’est pas une position de principe. Quelle légitimité a l’HADOPI pour participer à la représentation française dans les organisations internationales ? Aucune ! La légitimité du suffrage universel ? Absolument pas ! Le fait d’avoir été nommé un jour sans que l’on connaisse vraiment les critères de la nomination ? Certainement pas !</blockquote>
+
<blockquote>C'est le début de la sagesse, mais ce n'est pas une position de principe. Quelle légitimité a l'HADOPI pour participer à la représentation française dans les organisations internationales ? Aucune ! La légitimité du suffrage universel ? Absolument pas ! Le fait d'avoir été nommé un jour sans que l'on connaisse vraiment les critères de la nomination ? Certainement pas !</blockquote>
  
<blockquote>Je vais raisonner par analogie. Il y a une délégation française aux droits de l’homme auprès de l’OCDE, avec deux personnages censés représenter la France. Récemment, il y a eu un débat sur les organisations sectaires. Alors que, sur ce sujet, le gouvernement français a une position très claire, l’un des deux représentants de la France a mis la France en cause pour sa politique dans ce domaine.</blockquote>
+
<blockquote>Je vais raisonner par analogie. Il y a une délégation française aux droits de l'homme auprès de l'OCDE, avec deux personnages censés représenter la France. Récemment, il y a eu un débat sur les organisations sectaires. Alors que, sur ce sujet, le gouvernement français a une position très claire, l'un des deux représentants de la France a mis la France en cause pour sa politique dans ce domaine.</blockquote>
  
<blockquote>Voilà ce qui arrive quand vous laissez représenter la France par des gens qui n’ont aucune légitimité pour le faire ! Le fait d’être nommé par décision discrétionnaire du prince ne suffit pas à conférer la légitimité. Ce n’est pas la démocratie, c’est le retour à l’Ancien régime !</blockquote>
+
<blockquote>Voilà ce qui arrive quand vous laissez représenter la France par des gens qui n'ont aucune légitimité pour le faire ! Le fait d'être nommé par décision discrétionnaire du prince ne suffit pas à conférer la légitimité. Ce n'est pas la démocratie, c'est le retour à l'Ancien régime !</blockquote>
  
  
===== 12/03/2009 [http://www.assemblee-nationale.fr/13/cri/2008-2009/20090192.asp Débats HADOPI : propagande, sanctions, autorité judiciaire] =====
+
===== 12/03/2009 [http://www.assemblee-nationale.fr/13/cri/2008-2009/20090192.asp Débats HADOPI : propagande, sanctions, autorité judiciaire, SPRD] =====
  
 
<blockquote>Mes collègues viennent de soulever de vrais problèmes. Mme Billard, avec une intégrité rare – je connais d'autres membres des Verts qui n'ont pas cette qualité –, a pratiqué son autocritique.</blockquote>
 
<blockquote>Mes collègues viennent de soulever de vrais problèmes. Mme Billard, avec une intégrité rare – je connais d'autres membres des Verts qui n'ont pas cette qualité –, a pratiqué son autocritique.</blockquote>
Ligne 180 : Ligne 180 :
  
 
<blockquote>Les propos de Mme la rapporteure étaient à l'évidence inexacts puisqu'elle soutient qu'avec la procédure administrative tout ira bien. En réalité, si vous aviez, hier, la paire de menottes aux poignets, vous en avez désormais une autre paire aux chevilles. La première vous est mise sans que le délit soit prouvé et vous n'avez pas la possibilité de vous défendre à moins d'avoir recours à l'autorité judiciaire. J'entends déjà Mme la ministre ou Mme la rapporteure affirmer que l'on peut avoir recours au juge. Vous pensez bien ! Vous allez pousser les gens dans la bureaucratie et surtout dans l'arbitraire contre lequel ils ne pourront pas se défendre.</blockquote>
 
<blockquote>Les propos de Mme la rapporteure étaient à l'évidence inexacts puisqu'elle soutient qu'avec la procédure administrative tout ira bien. En réalité, si vous aviez, hier, la paire de menottes aux poignets, vous en avez désormais une autre paire aux chevilles. La première vous est mise sans que le délit soit prouvé et vous n'avez pas la possibilité de vous défendre à moins d'avoir recours à l'autorité judiciaire. J'entends déjà Mme la ministre ou Mme la rapporteure affirmer que l'on peut avoir recours au juge. Vous pensez bien ! Vous allez pousser les gens dans la bureaucratie et surtout dans l'arbitraire contre lequel ils ne pourront pas se défendre.</blockquote>
 +
 +
<blockquote>La rémunération des œuvres prévue aux articles L. 214-1 à L. 214-5 du code de la propriété intellectuelle ne permet pas à certains ayants droit de se faire rémunérer pour l'usage global de leurs œuvres, dès lors que celles-ci sont diffusées sous forme de licence, de rémunération proportionnée ou de forfait. Dans les faits, c'est l'organisme collecteur qui a la charge de la redistribution des sommes aux ayants droit, au prorata des passages radio, sur la base d'une information qui se révèle lacunaire à l'heure actuelle.</blockquote>
 +
 +
<blockquote>L'amendement que nous vous soumettons a donc pour ambition de pallier cette carence d'information en obligeant les utilisateurs à fournir aux organismes collecteurs les statistiques précises des titres diffusés, afin que la répartition des rémunérations soit réellement représentative de l'audience que cumulent les œuvres.</blockquote>
 +
 +
<blockquote>Sans résoudre le problème abyssal de la disproportion entre la rémunération des artistes et la part du lion que se taillent la SACEM, le CNC et les majors sur les recettes générées par les biens culturels qu'ils gèrent, une telle mesure va dans le sens d'une plus grande équité de la rémunération des artistes, et d'une plus grande transparence.</blockquote>
 +
 +
<blockquote>Nous touchons là au cœur du problème. Vous nous avez dit, vous appuyant sur la liste des dix mille, que nous ignorions la demande des créateurs, des auteurs. Nous, nous vous disons qu'il y a une solution. Même si vous êtes encore récente dans le champ, madame Albanel, vous savez bien que l'on juge les hommes et les femmes politiques, non pas à ce qu'ils disent, mais à ce qu'ils font. Aujourd'hui, vous avez l'occasion de poser un acte en donnant le feu vert à notre amendement. Nous verrons si vos affirmations sont vérifiées par la position que vous allez prendre sur notre amendement. Nous faisons la loi, nous pouvons délibérer tout de suite et rendre une plus grande justice, au bénéfice des créateurs.</blockquote>
 +
 +
<blockquote>Je comprends, madame la ministre, que votre souffleur vous empêche de m'écouter. Je sais que vous avez des talents pour la stéréophonie. Néanmoins, je préférerais que vous m'écoutiez, moi, qui ai la légitimité du suffrage universel, plutôt que votre collaborateur qui vous souffle la réponse, ou M. Lefebvre, qui ne fait pas confiance à votre collaborateur, parce qu'il dispose, lui, de la partition récemment écrite.</blockquote>
 +
 +
<blockquote>Madame la ministre, nous tenons beaucoup à ces amendements, puisqu'il ne s'agit pas seulement du nôtre : plusieurs disent la même chose. Vous voyez bien que c'est l'un des nœuds de ce projet de loi. Allez-vous le dénouer, ou allez-vous serrer la corde au cou des créateurs ?</blockquote>
 +
 +
<blockquote>[...]</blockquote>
 +
 +
<blockquote>Madame la ministre, vous avez fait tout à l'heure une référence à mon intervention, et montré votre affection pour les artistes par une preuve d'amour chiffrée à 9 millions d'euros. Ce n'est quand même pas cher comparé au paquet fiscal : 14 milliards, ça c'est de l'amour vrai ! Vous n'êtes pas prête à acheter les créateurs, puisque vous leur donnez trois fois rien.
 +
 +
<blockquote>Nous, nous proposons un partage équitable : que ceux qui se sont donné, en fin de compte, seulement la peine d'accumuler de l'argent pour l'investir après partagent plus les bénéfices retirés avec ceux qui sont la véritable source, c'est-à-dire l'intelligence, la création. Ceux-là, vous n'augmentez leur part qu'à un niveau de 9 millions, une aumône quand notre proposition va beaucoup plus loin en reconnaissant le talent et en rémunérant l'intelligence. Vous ne voulez pas l'entendre, car vous n'êtes pas dans le champ de la rémunération de l'intelligence ; vous êtes dans celui de la rémunération du capital investi. Nous ne sommes pas du tout au même endroit – nous sommes plus proches de l'Académie et vous de la Bourse –, et nous n'avons pas les mêmes choix. C'est tout !</blockquote>
  
 
===== 12/03/2009 [http://www.assemblee-nationale.fr/13/cri/2008-2009/20090191.asp Débats HADOPI : renvoi en commission, partage sur Internet, répression, propagande, droits fondamentaux, accès Internet] =====
 
===== 12/03/2009 [http://www.assemblee-nationale.fr/13/cri/2008-2009/20090191.asp Débats HADOPI : renvoi en commission, partage sur Internet, répression, propagande, droits fondamentaux, accès Internet] =====

Version du 19 mars 2009 à 11:55

Mémoire politique : Jean-Pierre Brard, député

Jean-Pierre Brard

Informations générales

Calligraphy.png
Contact
{{#icon:Mp_cliquez_pour_appeler.png|01 40 63 92 00||callto://+33140639200}}
  • Assemblée nationale 126 rue de l'Université, 75355 Paris 07 SP
    Tél. : 01 40 63 92 00 - Fax : 01 40 63 61 24


Fonctions à l'Assemblée nationale

  • Commission : Commission des finances (Secrétaire)
  • Délégation et Office : Membre de l'office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques
  • Groupe d'amitié : Yemen (Président), Allemagne (Vice-Président), Israël (Vice-Président), Mali (Vice-Président), Vietnam (Vice-Président)
  • Groupe d'études : Cinéma et production audiovisuelle (Vice-Président), Sectes (Vice-Président)
  • Mission d'information : Membre de la Mission d'évaluation et de contrôle (commission des finances)

Mandats

  • Mandats et fonctions en cours à l'Assemblée nationale
    • Élections du 17/06/2007 - Mandat du 20/06/2007 (élections générales)
  • Anciens mandats et fonctions à l'Assemblée nationale
    • Élections du 12/06/1988 - Mandat du 13/06/1988 (élections générales) au 01/04/1993 (Fin de législature)
    • Élections du 28/03/1993 - Mandat du 02/04/1993 (élections générales) au 21/04/1997 (Fin de législature)
    • Élections du 01/06/1997 - Mandat du 01/06/1997 (élections générales) au 18/06/2002 (Fin de législature)
    • Élections du 16/06/2002 - Mandat du 19/06/2002 (élections générales) au 03/02/2003 (Annulation de l'élection sur décision du Conseil constitutionnel)
    • Élections du 23/03/2003 - Mandat du 24/03/2003 (élection partielle, suite à l'annulation de l'élection d'un député : M. Jean-Pierre Brard) au 19/06/2007 (Fin de législature)
  • Organismes extra-parlementaires
    • Membre titulaire de l'Observatoire de la sécurité des cartes de paiement
  • Mandats locaux en cours
    • Membre du Conseil municipal de Montreuil, Seine-Saint-Denis (90588 habitants)
  • Anciens mandats locaux
    • Conseil municipal de Montreuil (Seine-Saint-Denis)
      • Mandat du 15/03/1984 au 19/03/1989 : Maire
      • Mandat du 20/03/1989 au 18/06/1995 : Maire
      • Mandat du 19/06/1995 au 18/03/2001 : Maire
      • Mandat du 19/03/2001 au 16/03/2008 : Maire
    • Conseil régional d'Ile-de-France
      • Mandat du 17/03/1986 au 13/06/1988 : Membre du conseil régional

Prises de positions

Sources d'informations

Positions

Merci d'enrichir cette partie en y rapportant les prises de positions de Jean-Pierre Brard concernant les sujets traités par La Quadrature du Net (consultez la page Aide:Memoire_politique pour savoir comment faire).

12/03/2009 Débats HADOPI : gestapo, procédures de l'AN, avis CNIL, HADOPI représentant de la France dans les organisations internationales

Monsieur le président, cet après-midi, vous vous êtes comporté à mon égard avec une grossièreté que je n'ai jamais constatée dans cet hémicycle depuis plus de vingt ans que je m'honore de la confiance de mes concitoyens. Aux lettres de cachet de Mme la ministre, vous avez ajouté le bâillon.

Cette assemblée est régie par des règles que vous avez bafouées. D'ordinaire, on laisse les députés s'exprimer, surtout au cours d'un débat d'une telle importance. En m'empêchant de prendre la parole avant le vote d'un amendement, ce n'est pas seulement moi que vous avez agressé, ce sont les personnes que nous défendons ici, qu'il s'agisse des internautes ou de celles et ceux que nous représentons.

Au-delà de ma personne – nous vous connaissons : des incidents-limite ont déjà eu lieu cet après-midi à l'égard de nos collègues socialistes –, votre comportement déshonore, et je pèse mes mots, la fonction que vous exercez. Bien sûr, un tel incident ne saurait se répéter, mais le seul fait qu'il se soit produit est déjà indécent.

Pour ce qui me concerne, je ne suis pas prêt à l'accepter. Je demande donc une suspension de séance.

[...]

Monsieur le président, vous récrivez l'histoire. Évidemment, vous êtes gêné, parce que vous vous rendez compte que vous avez commis une bévue, tout à l'heure, à vingt heures dix. C'est votre faute si nous sommes allés jusqu'à cette heure. Nos collègues Christian Paul et Patrick Bloche avaient demandé que la séance soit levée plus tôt, précisément pour ne pas faire les choses à la va-vite.

Vous avez fait un autre choix. C'est exclusivement à vous qu'il appartenait d'en décider. À la limite, je dirai que nous n'avons pas à avoir d'opinion sur ce point.

Ce qui a été à l'origine de l'incident, et dont vous êtes seul responsable, c'est que lorsque, après que nos collègues se sont exprimés, j'ai demandé la parole, au nom du groupe GDR, vous me l'avez refusée d'une façon complètement arbitraire, avant le vote, et alors même qu'il s'agissait d'un débat où les positions sont très opposées et très identitaires.

Est-ce une bévue, un faux-pas ? Peu importe. Que vous le vouliez ou non, le résultat est le même : alors que votre position doit être obligatoirement une position de neutralité, parce qu'ainsi le veut notre règlement, et parce que c'est ainsi que le débat fonctionne bien, vous m'avez privé de la parole au moment où nous sommes en pleine confrontation avec le Gouvernement. Vous êtes ainsi apparu, à tort ou à raison, comme manipulant le bâillon au moment où je voulais répondre au Gouvernement. C'est inacceptable, pour les raisons que j'ai dites tout à l'heure.

Comme tous mes collègues, je représente des points de vue et je représente nos concitoyens. Nous sommes des élus de la nation. Et le président doit veiller à l'équité dans le débat. Vous n'avez pas été équitable, et vous le savez. C'est l'opinion qui s'exprimait tout à l'heure dans les couloirs, une opinion partagée par nos collègues.

Ne récrivez pas l'histoire, comme vous venez de le faire à propos de la suspension de séance. Cette demande de suspension de séance n'était que l'écho de votre comportement à vingt heures dix.

Si vous voulez que le débat se déroule convenablement – ce que nous souhaitons tous, sauf vous, peut-être –, il faut que vous nous disiez comment vous avez pu ainsi me priver de la parole tout à l'heure.

Monsieur le président, je suis prêt à arrêter cette confrontation de procédure. Mais vous m'avez privé de la parole. Vous avez appelé le vote en me refusant la parole. Il peut arriver, au perchoir, que l'on ne voie pas un orateur qui demande à s'exprimer. Notre collègue Patrick Bloche a fort bien expliqué cet après-midi comment le champ visuel peut se rétrécir. Mais ce n'est pas ce qui s'est produit tout à l'heure. Vous m'avez explicitement refusé la parole. Et ce n'est pas acceptable.

Oh, moi, je suis prêt à pardonner, je suis prêt à tout ce que vous voulez, à condition que le président reconnaisse au moins qu'il m'a privé de la parole, ce qu'il ne dit même pas, pour l'instant.

Vous n'avez pas bien compris, monsieur le président. Est-ce que vous garantissez un déroulement normal du débat, ce soir ?

Monsieur le président, est-ce que je peux conclure de ce que vous venez de dire que vous vous engagez à ne pas renouveler le comportement qui a été le vôtre à la fin de la séance de cet après-midi ?

J'en prends acte, et j'interprète cela comme des excuses publiques.

[...]

Monsieur le président, madame la ministre, il est utile de retrouver la sérénité.

Monsieur le président de la commission, les excès ont été commis par Mme la ministre. Personne d'autre qu'elle, ici, n'a fait référence à la police politique hitlérienne.

Il peut arriver que la langue fourche, mais le dérapage verbal a au moins une fonction.

L'excès de la parole ministérielle, disais-je, aussi malheureux fût-il, a au moins une fonction. Il permet de déplacer le débat et de discréditer ceux qui contestent la position gouvernementale, en faisant passer cette contestation pour excessive. Ce n'est pas convenable.

Revenons au fond. Nous n'avons pas l'intention de vous convaincre. Nous savons bien que vous êtes en service commandé. Nous nous adressons à nos collègues et plus encore à ceux qui nous regardent et qui doivent savoir la vérité.

Nous considérons que votre texte – nous l'avons démontré – est une atteinte insupportable aux libertés. Soyons concrets. Notre collègue Martine Billard a cité des exemples. Pensons à un jeune de dix-neuf ans ou à une personne âgée de quatre-vingt-cinq ans qui se retrouveront confrontés à vos fameuses lettres recommandées. Ils ne sauront pas comment réagir. Les choses vont empirer.

Vous ajoutez à cela le renversement de la charge de la preuve, qui est heureusement, dans notre droit, une disposition d'exception. C'est à la personne qui est accusée de prouver qu'elle n'a pas fraudé.

Je vais raisonner par analogie pour me faire comprendre. Quand vous êtes accusé par l'administration fiscale d'avoir donné un dessous de table sur la base duquel vous êtes taxé, alors même que ce n'est pas vrai, comment pouvez-vous faire la démonstration que vous n'avez rien donné ? C'est impossible. C'est le règne de l'arbitraire total.

Tout à l'heure, monsieur le rapporteur, vous faisiez référence à un avis très ancien de la CNIL, comme si 2008 était si loin de nous !

Très ancien ! Le Sénat a adopté le texte à la fin du mois d'octobre. Ce n'est pas ancien, c'est très actuel. Et cela éclaire notre débat.

L'avis de la CNIL est accablant. Monsieur le rapporteur, le poids de vos notes pour forger votre réflexion est certainement très important mais, en termes législatifs, cela ne vaut rien.

Seule la note de la CNIL vaut quelque chose. Celle-ci nous a été partiellement lue par Christian Paul. C'est un véritable réquisitoire, qui montre à quel point votre loi est attentatoire aux libertés.

Vous avez dit, monsieur le rapporteur, qu'il y aurait des amendements pour « perfectionner ». Mais on ne perfectionne pas ce qui est liberticide. On y renonce ou on le confirme.

Le fait que vous mettiez un peu de miel autour ne change rien à la perversion du texte.

Tout cela confirme la cohérence de votre politique et la dérive monarchique et autoritaire du régime.

Il y a eu la loi sur l'audiovisuel, où l'on a bâillonné les médias. Il y a la loi sur le règlement de l'Assemblée avec l'affaire du temps de parole, qui va dans le même sens. Maintenant, on bâillonne les internautes. C'est la dérive autoritaire du régime. Il est très important que les personnes qui nous regardent aujourd'hui comprennent bien la cohérence de votre politique. Il n'y a pas de hasard. C'est construit. Le grand organisateur réside au palais de l'Élysée, les ministres ne sont que les exécutants puisque, la plupart du temps, ils apprennent par les médias les textes qu'ils devront défendre ou les décisions qu'ils devront prendre, même quand ils ne sont pas d'accord avec elles.

[...]

M. le rapporteur a beau être jeune, il manie la langue de bois comme un vieux politicien !

Décodons son propos, pour ceux qui nous regardent : sur le fond, il est d'accord, mais il ne faut surtout pas adopter l'amendement ! Or, d'une certaine façon, l'amendement de M. Martin-Lalande vise à combattre la prohibition. Chacun sait que la retenue et la prohibition ouvrent le terrain aux trafiquants, comme au temps d'Al Capone pour l'alcool. Certes, comparaison n'est pas raison, mais le système est similaire. Dès lors, M. Martin-Lalande est très bien avisé de favoriser la fluidité afin que les internautes aient accès dans de meilleures conditions aux produits qui leur sont offerts.

En vous écoutant, monsieur le rapporteur et madame la ministre, je me demande quelles sont vos marges d'appréciation réelles. Qu'est-ce que les arbitrages rendus par Matignon et surtout l'Élysée vous donnent l'autorisation d'accepter ? Nous gagnerions beaucoup de temps si vous nous disiez d'emblée que vous n'avez aucune marge et que tous les amendements seront refusés. Cela ne nous empêchera d'ailleurs pas de les défendre, mais au moins n'aurez-vous pas à répondre à chaque fois en langue de bois pour nous dire que, malgré l'intérêt qu'ils suscitent en vous, vous réprouvez leur adoption.

Je constate que M. Dionis du Séjour, qui est lui aussi un député très expérimenté, partage mon opinion – ce qui n'est pas toujours le cas, puisque nous ne siégeons pas sur les mêmes bancs.

Nous sommes de connivence. Si d'aventure M. Martin-Lalande renonçait à son amendement, il va de soi que je le reprendrais !

[...]

C'est le début de la sagesse, mais ce n'est pas une position de principe. Quelle légitimité a l'HADOPI pour participer à la représentation française dans les organisations internationales ? Aucune ! La légitimité du suffrage universel ? Absolument pas ! Le fait d'avoir été nommé un jour sans que l'on connaisse vraiment les critères de la nomination ? Certainement pas !

Je vais raisonner par analogie. Il y a une délégation française aux droits de l'homme auprès de l'OCDE, avec deux personnages censés représenter la France. Récemment, il y a eu un débat sur les organisations sectaires. Alors que, sur ce sujet, le gouvernement français a une position très claire, l'un des deux représentants de la France a mis la France en cause pour sa politique dans ce domaine.

Voilà ce qui arrive quand vous laissez représenter la France par des gens qui n'ont aucune légitimité pour le faire ! Le fait d'être nommé par décision discrétionnaire du prince ne suffit pas à conférer la légitimité. Ce n'est pas la démocratie, c'est le retour à l'Ancien régime !


12/03/2009 Débats HADOPI : propagande, sanctions, autorité judiciaire, SPRD

Mes collègues viennent de soulever de vrais problèmes. Mme Billard, avec une intégrité rare – je connais d'autres membres des Verts qui n'ont pas cette qualité –, a pratiqué son autocritique.

Nous attendons, madame la ministre, que vous fassiez la vôtre. Ce matin, nous vous avons fait une proposition d'apaisement visant à ce que chacun des quatre groupes présents dans notre assemblée puissent disposer d'une tribune pour exposer sa position, le débat démocratique nourrissant ensuite l'échange avec les internautes.

Si vous faisiez un geste en ce sens, le débat serait fortement apaisé et pourrait se poursuivre dans de bonnes conditions.

Je rappelle que des clivages existent à l'intérieur de certains groupes, en particulier l'UMP, ce qui permettra des rapprochements et même des positions communes autour d'amendements susceptibles de satisfaire les revendications des internautes en reconnaissant la communication électronique comme un droit fondamental. J'entends bien que vous n'aimez pas cette épithète : laissons donc « fondamental » entre parenthèses et parlons simplement de « droit ».

Madame Albanel, vous êtes ici présente en tant que ministre libérée de ses tutelles habituelles, je veux parler de celles de la rue du Faubourg Saint-Honoré. Vous avez la possibilité de nous répondre directement : c'est vous et vous seule qui êtes comptable à cette heure de la politique du Gouvernement.

Je suis persuadé – mais je ne veux pas parler au nom de mes collègues socialistes – que si vous faisiez ce geste, le débat en progresserait d'autant.

[...]

Les propos de Mme la rapporteure étaient à l'évidence inexacts puisqu'elle soutient qu'avec la procédure administrative tout ira bien. En réalité, si vous aviez, hier, la paire de menottes aux poignets, vous en avez désormais une autre paire aux chevilles. La première vous est mise sans que le délit soit prouvé et vous n'avez pas la possibilité de vous défendre à moins d'avoir recours à l'autorité judiciaire. J'entends déjà Mme la ministre ou Mme la rapporteure affirmer que l'on peut avoir recours au juge. Vous pensez bien ! Vous allez pousser les gens dans la bureaucratie et surtout dans l'arbitraire contre lequel ils ne pourront pas se défendre.

La rémunération des œuvres prévue aux articles L. 214-1 à L. 214-5 du code de la propriété intellectuelle ne permet pas à certains ayants droit de se faire rémunérer pour l'usage global de leurs œuvres, dès lors que celles-ci sont diffusées sous forme de licence, de rémunération proportionnée ou de forfait. Dans les faits, c'est l'organisme collecteur qui a la charge de la redistribution des sommes aux ayants droit, au prorata des passages radio, sur la base d'une information qui se révèle lacunaire à l'heure actuelle.

L'amendement que nous vous soumettons a donc pour ambition de pallier cette carence d'information en obligeant les utilisateurs à fournir aux organismes collecteurs les statistiques précises des titres diffusés, afin que la répartition des rémunérations soit réellement représentative de l'audience que cumulent les œuvres.

Sans résoudre le problème abyssal de la disproportion entre la rémunération des artistes et la part du lion que se taillent la SACEM, le CNC et les majors sur les recettes générées par les biens culturels qu'ils gèrent, une telle mesure va dans le sens d'une plus grande équité de la rémunération des artistes, et d'une plus grande transparence.

Nous touchons là au cœur du problème. Vous nous avez dit, vous appuyant sur la liste des dix mille, que nous ignorions la demande des créateurs, des auteurs. Nous, nous vous disons qu'il y a une solution. Même si vous êtes encore récente dans le champ, madame Albanel, vous savez bien que l'on juge les hommes et les femmes politiques, non pas à ce qu'ils disent, mais à ce qu'ils font. Aujourd'hui, vous avez l'occasion de poser un acte en donnant le feu vert à notre amendement. Nous verrons si vos affirmations sont vérifiées par la position que vous allez prendre sur notre amendement. Nous faisons la loi, nous pouvons délibérer tout de suite et rendre une plus grande justice, au bénéfice des créateurs.

Je comprends, madame la ministre, que votre souffleur vous empêche de m'écouter. Je sais que vous avez des talents pour la stéréophonie. Néanmoins, je préférerais que vous m'écoutiez, moi, qui ai la légitimité du suffrage universel, plutôt que votre collaborateur qui vous souffle la réponse, ou M. Lefebvre, qui ne fait pas confiance à votre collaborateur, parce qu'il dispose, lui, de la partition récemment écrite.

Madame la ministre, nous tenons beaucoup à ces amendements, puisqu'il ne s'agit pas seulement du nôtre : plusieurs disent la même chose. Vous voyez bien que c'est l'un des nœuds de ce projet de loi. Allez-vous le dénouer, ou allez-vous serrer la corde au cou des créateurs ?

[...]

Madame la ministre, vous avez fait tout à l'heure une référence à mon intervention, et montré votre affection pour les artistes par une preuve d'amour chiffrée à 9 millions d'euros. Ce n'est quand même pas cher comparé au paquet fiscal : 14 milliards, ça c'est de l'amour vrai ! Vous n'êtes pas prête à acheter les créateurs, puisque vous leur donnez trois fois rien.

Nous, nous proposons un partage équitable : que ceux qui se sont donné, en fin de compte, seulement la peine d'accumuler de l'argent pour l'investir après partagent plus les bénéfices retirés avec ceux qui sont la véritable source, c'est-à-dire l'intelligence, la création. Ceux-là, vous n'augmentez leur part qu'à un niveau de 9 millions, une aumône quand notre proposition va beaucoup plus loin en reconnaissant le talent et en rémunérant l'intelligence. Vous ne voulez pas l'entendre, car vous n'êtes pas dans le champ de la rémunération de l'intelligence ; vous êtes dans celui de la rémunération du capital investi. Nous ne sommes pas du tout au même endroit – nous sommes plus proches de l'Académie et vous de la Bourse –, et nous n'avons pas les mêmes choix. C'est tout !

12/03/2009 Débats HADOPI : renvoi en commission, partage sur Internet, répression, propagande, droits fondamentaux, accès Internet

Selon M. Gosselin, c'est une loi qui ne durera pas très longtemps.

C'est vrai que ce gouvernement a une créativité extraordinaire puisqu'il vient d'inventer les projets de loi rectificative mensuels. On peut donc imaginer la durée de vie de votre loi, madame la ministre.

Le rapporteur et vous-même étiez dans vos rôles tout à l'heure, avec un certain talent d'ailleurs. On me dit que vous avez reçu chacun deux mails, un de M. Olivennes et un du PDG d'Universal, pour vous remercier de défendre leurs intérêts avec un grand zèle.

Monsieur Riester, vous parliez de musique. Moi, je préfère la flûte et la harpe à la grosse caisse que vous utilisez.

Mme Billard a très bien démontré que les dispositions que vous prenez ne permettront pas d'atteindre les objectifs que vous fixez.

Avec « jaimelesartistes.com », il y a même intrusion dans la vie privée des parlementaires. Si, même ici, nous ne sommes pas protégés, madame Albanel, ce n'est pas avec vous que nous devrions discuter, mais avec M. Morin, le ministre de la défense, pour mettre en place des systèmes plus sécurisés.

En réalité, ce n'est pas l'objectif. La vérité, vous l'avez dite, et pas seulement entre les lignes, à propos de cette loi DADVSI qu'il eût fallu abroger comme Patrick Bloche l'a très bien expliqué : vous avez déclaré en effet que cette loi a permis d'attraper le gros poisson mais qu'il reste du « petit piratage, léger, inconscient ». Autrement dit, vous vous acharnez sur les petits, les faibles, pour les livrer aux requins.

Je ne fais pas pleurer. Nous, nous sommes là pour défendre les libertés des gens qui n'ont pas les moyens de faire entendre leur voix, c'est ici notre légitimité. Vous, vous êtes les fondés de pouvoir des privilégiés. Mme Albanel dit d'ailleurs que, sur 99 centimes d'euros, l'auteur en perçoit dans certains cas jusqu'à 9 ! Un cheval, une alouette, c'est ainsi que vous voyez l'égalité. Nous, nous sommes les fils de la Révolution française de la Commune de Paris. Ça vous fait hurler ? C'est l'hommage du vice à la vertu que vous nous rendez.

Évidemment qu'il faut retourner en commission, madame la ministre, puisque vous n'avez fait ni évaluation de la loi DADVSI ni étude d'impact pour savoir ce que pourrait donner votre nouvelle loi. Vous n'appliquez même pas les critères définis dans la réforme constitutionnelle et dans la révision générale des politiques publiques. Vous avez un objectif, et tout le resten'est qu'habillage pour faire passer la pilule et la rendre moins amère.

Qui est responsable de la misère des auteurs, des auteurs-interprètes ? Qui a cassé le statut des intermittents ? C'est vous, mais vous ne voulez pas l'admettre.

Après les centres de rétention administrative pour les travailleurs immigrés, vous inventez le centre de rétention électronique où, dans un espace immatériel comme il se doit, vous allez reléguer tous les internautes que vous aurez poursuivis de vos foudres parce qu'ils ne contribuent pas assez à l'enrichissement des majors.

Nous refusons cette mise en quarantaine de tous ceux qui sont obligés d'utiliser Internet. Je ne parle pas de ceux qui l'utilisent pour le plaisir, même si je ne vois pas pourquoi on ne l'utiliserait pas également pour le plaisir, mais de tous ceux qui cherchent un travail. Imaginez le père ou la mère de famille dont le fils ou la fille aura téléchargé sans les en informer. Ces parents, au chômage, n'auront pas le droit d'utiliser Internet parce que vous les aurez bouclés, peut-être avec un bracelet électronique, dans le centre de rétention électronique.

Nous sommes là pour défendre les libertés individuelles et collectives et nous allons mener une lutte pied à pied, comme l'ont fait nos ancêtres à Valmy, seuls contre toute l'Europe de la coalition. Nous sommes les héritiers de cette tradition de liberté que vous foulez aux pieds.

[...]

Madame la ministre, des questions simples vous ont été posées. Sur le site en question, Bouygues, TF1, M6 sont appelés des « partenaires ». En quoi sont-ils des partenaires ? Vous dites qu'ils n'ont rien payé. Ce qui serait pire encore, c'est que vous vous acoquiniez avec de tels « partenaires » gratuitement, si j'ose dire, que vous leur serviez la soupe sans leur faire payer leur écot.

Notre collègue Patrick Bloche a fait une proposition qui pourrait être consensuelle. Que vous ayez le droit de vous exprimer, en tant que membre du Gouvernement, sur un site financé par le ministère, il n'y a là rien que de très normal. Mais le pluralisme appelle la pluralité des expressions. Nous pourrions sortir de la présente difficulté si vous vous engagiez à ce que chacun des groupes présents dans cet hémicycle puisse réagir à votre position.

Je termine en rappelant, madame la ministre, que vous avez dit qu'il ne fallait pas confondre communication et propagande. Or il se trouve que je suis le rapporteur spécial des crédits du Premier ministre, j'ai découvert, l'année dernière, que 5 millions d'euros étaient prévus pour la communication. Mais, subrepticement, en catimini, 4 millions d'euros supplémentaires ont été utilisés à cette fin. Ils ne devaient pas apparaître au grand jour. Monsieur Lefebvre, vous qui êtes la petite voix de sa majesté impériale, savez-vous quel était l'objet de ces 4 millions d'euros ? Cette somme était destinée à financer une campagne – vous allez me dire s'il s'agissait d'une campagne de propagande ou de communication – pour convaincre les Français qu'en 2008, leur pouvoir d'achat avait augmenté.

Madame la ministre, si vous voulez échapper à la critique qui vous reproche de faire de la propagande, acceptez le pluralisme.

Si vous l'acceptiez, je pense qu'il pourrait y avoir un consensus entre nous. Vous qui êtes une femme de culture, vous ne pouvez pas être hostile au pluralisme, sauf à enterrer à nouveau nos grandes personnalités des Lumières.

[...]

Monsieur Laffineur, pour ne pas judiciariser, il y a une solution simple : ne pas faire de nouvelles lois, surtout quand elles sont inutiles.

Nous connaissons depuis longtemps notre collègue Patrice Martin-Lalande : il sait ce que parler et écrire veut dire, y compris à propos de l'espace numérique. Deux phrases de son amendement sont extrêmement importantes : « L'accès à Internet constitue un droit fondamental. » et : « Le droit à l'anonymat numérique est reconnu à chaque individu. ». Dans l'exposé sommaire, il utilise l'adverbe : « solennellement ». Il est vrai que sa rédaction a une connotation solennelle, ce qui renvoie à des textes qui font honneur à notre État républicain. Nous sommes évidemment très favorables à cet amendement.

Madame la ministre, vous nous répondez qu'on n'est pas obligé d'avoir Internet chez soi. Mais Martine Billard l'a fort bien dit : les droits évoluent. L'accès à l'électricité et à l'eau est un droit fondamental, et le droit à la communication est devenu, lui aussi, un droit fondamental. Songez à la vieille dame isolée dans son village du Massif Central et qui, aujourd'hui, peut communiquer avec ses petits-enfants. Vous voulez les priver en ne reconnaissant pas cette faculté comme étant un droit fondamental. Vous qui avez été à Versailles – seulement de passage, je le reconnais... [Quatre ans !] Vous avez l'air de dire cela comme si ces quatre ans, c'était la perpétuité. Je reconnais que c'est quatre fois plus que la peine que vous proposez ! À Versailles, du temps de sa splendeur et de la présence de son résident le plus illustre, le Roi Soleil, il n'y avait pas de robinet, et ce n'était pas un droit fondamental que d'avoir l'eau chez soi. Aujourd'hui, chacun considère que c'en est un.

Vous avez dit que l'accès à Internet était possible dans nombre de lieux en dehors de son domicile. Mais pour l'eau, c'est la même chose. Si je suis votre raisonnement, allez-vous alors renvoyer les gens qui n'ont pas pu payer leur facture d'eau à la borne-fontaine la plus proche ou bien au lavoir, ou bien encore faire appel aux porteurs d'eau qui descendraient en ligne directe des familles spécialisées qui ravitaillaient Versailles à l'époque ? Bien sûr que non. Si nous raisonnons par analogie, il est incontestable que l'accès à la communication numérique est un droit fondamental. À ce titre, j'apprécie particulièrement le caractère solennel que notre collègue Martin-Lalande a donné à la rédaction de son amendement. Les collègues, quel que soit leur banc, sont placés ce matin devant leurs responsabilités. Comme ce projet de loi est globalement médiocre et dangereux, ils ont là l'occasion de prendre position. Vous voyez bien, mes chers collègues, que, si cet amendement est adopté, il donnera une autre portée et un autre sens au projet de loi, et il amènerait évidemment l'Assemblée à en décliner toutes les conséquences dans la suite de son examen.

[...]

Je voudrais m'appuyer sur les propos de notre collègue Marc Laffineur. En gros, il a dit : reconnaître qu'il s'agit d'un droit fondamental serait aller trop loin. Qu'est-ce qu'un droit fondamental ? C'est un droit ouvert à tous, nous le savons depuis la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.

Souvenez-vous, à l'époque, qui disait que tout ça allait trop loin. Trois états étaient réunis : le tiers état, le clergé et la noblesse. Deux disaient : ça va trop loin ! Certains auraient même préféré ne pas commencer du tout. À un moment donné, le clergé et la noblesse – et vous représentez bien la noblesse, celle des coffres-forts – ont expliqué que cela allait trop loin, et ils se sont opposés aux droits conquis par le tiers état, que nous représentons ici – nous en sommes les filles et les fils, et fiers de l'être !

Nous sommes donc pour un droit pour tous, un droit fondamental, le droit numérique, le droit de la communication.

[...]

Avant de défendre mon amendement [n° 336 Rect.], je voudrais souligner, à l'intention des gens qui nous regardent, les rapports de forces tels qu'ils existent actuellement et qui ne correspondent pas à la réalité du pays.

Il en va de la responsabilité de chaque citoyen pour que le rapport de forces dans l'hémicycle soit à l'image du pays réel, et qu'on ne soit pas dans ce monde improbable que nos collègues de l'UMP représentent.

Madame la ministre, aucune restriction ne peut être imposée aux droits et libertés fondamentaux des utilisateurs titulaires d'un accès à des services de communication au public en ligne sans décision préalable des autorités judiciaires, conformément à l'article 11 de la charte droits fondamentaux de l'Union européenne concernant la liberté d'expression et d'information.

Nous condamnons, à plusieurs titres, le système de la riposte graduée opéré par la Haute autorité à laquelle vous donnez le pouvoir de juger et de sanctionner, ce qui doit rester une prérogative exclusive de l'institution judiciaire indépendante du pouvoir exécutif. Par cet amendement, nous voulons réintroduire des principes essentiels du droit des personnes.

En effet, votre loi entre en totale contradiction avec la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, qui prévoit :« Toute personne a droit à la liberté d'expression. Ce droit comprend la liberté d'opinion ou de communiquer des informations ou des idées sans qu'il puisse y avoir d'ingérence d'autorités publiques et sans considérations de frontières. » C'est dans cet esprit que l'amendement 138 au « paquet télécoms », que nous reproduisons ici, a été adopté par le Parlement européen le 24 septembre 2008, par 88 % des eurodéputés, tous groupes confondus.

En matière de déni de droit, permettez-moi tout d'abord de rappeler que la coupure de l'accès à Internet représente, dans la société moderne, une sanction très lourde de conséquences. Cela instituerait une forme d'exclusion qui peut avoir de graves répercussions sur le plan professionnel et personnel. Il semble impensable qu'une Haute autorité ait un tel pouvoir, sans que la décision soit motivée par des considérations plus impérieuses que celles du « respect du droit d'auteur » que vous invoquez et auquel vous sacrifiez une possibilité pour chacun de s'informer et de se cultiver. En revanche, vous ne voulez pas sauvegarder ces droits d'auteur d'une façon sonnante et trébuchante.

Les prérogatives de l'HADOPI entrent également en contradiction avec le principe de proportionnalité. La Cour de justice des communautés européennes a rendu un arrêt du 29 janvier 2008, «Promusicae contre Telefonica », stipulant que les droits de propriété intellectuelle ne pouvaient être placés au-dessus des droits fondamentaux de respect de la vie privée, qui seront bafoués par le fonctionnement de la Haute autorité.

Madame la ministre, vous vous improvisez ainsi gendarme des communications. Dans quel but ? Pour protéger les intérêts financiers des grands groupes ! Votre gouvernement privilégie encore une fois l'application des droits relatifs à la propriété privée, exploités ici au premier chef par les majors du disque, au détriment de la liberté de citoyens et du droit des auteurs.

Il devient nécessaire dans ce pays que les parlementaires se mobilisent pour protéger la vie privée des citoyens contre ces dérives autoritaires. En se passant de la justice, votre gouvernement se détourne des fondements constitutionnels qui font – faut-il parler à l'imparfait ? – de notre pays un État de droit, et que nous défendrons ici farouchement.

[...]

Il y a un désaccord fondamental entre nous, madame la ministre : vous ne voulez pas reconnaître l'époque où nous vivons.

Le droit à la communication est selon nous un droit fondamental. Votre position, madame la ministre, est tout à fait intéressante. Sans nier le droit européen, vous refusez de vous y conformer. D'ailleurs, M. Warsmann, parlementaire pourtant actif – mais peu progressiste, il est vrai : nul n'est parfait –, ne dit rien ; à vrai dire, tout cela le gêne un peu.

Si l'on vous suit bien, madame la ministre, il restera, à ceux que vous punirez méchamment, la voix – mais si la grand-mère habite loin, ce sera difficile – ou les signaux de fumée. Il n'y a pas, dites-vous, de droit imprescriptible au permis de conduire. Mais les droits fondamentaux ont évolué ! Du temps de Louis XIV, les droits à la santé, au logement, au repos ou à la retraite n'existaient pas ; ils ont été conquis par les forces vives de notre peuple auxquelles s'opposent nos collègues de l'UMP.

Comparaison n'est pas raison, madame la ministre ; j'en ferai une qui prouvera votre erreur. Le droit de posséder un compte bancaire est désormais reconnu, y compris pour ceux qui n'ont plus de compte. J'aperçois l'un de vos conseillers venir à votre secours avec une bouée, vous sentant comme sur une plaque qui, en train de se détacher d'un iceberg, commence à dériver.

Prenez garde, les eaux sont glacées ! Vous voyez bien que vos comparaisons, madame la ministre, ne sont pas raisonnables : le droit à la communication est assurément aussi fondamental que celui de posséder un compte bancaire. Quant à votre comparaison entre l'accès à l'Internet et le problème du dopage, elle témoigne d'une certaine audace de votre part, ce qui ne me semble pas être votre caractère premier.

Faut-il s'en remettre à Jean-Louis Debré et à Jacques Chirac, que vous réussissez à nous faire regretter ? S'ils ne sont pas de gauche, ils sont républicains. Faut-il s'en remettre à eux pour endiguer vos ardeurs liberticides ?

11/03/2009 Débats HADOPI : propagande, discussion générale, échanges sur Internet, industrie du divertissement, riposte graduée, sanctions, autorité judiciaire, surveillance

Au moment où nous entamons la discussion de ce projet de loi, il faut que le débat soit équilibré. Or tout à l'heure, madame la ministre, je vous ai vue sur TF1.

Peut-être n'était-ce pas assez long à votre goût ; pour ma part, j'ai trouvé que cela l'était déjà trop.

Et si j'ai trouvé votre intervention trop longue, c'est parce que l'équilibre n'était pas respecté.

On n'y entendait que la voix de son maître – la vôtre –, pas celle de la contradiction. C'est normal : M. Bouygues ne peut rien refuser à ses amis, et réciproquement !

Il faut que le débat s'anime, monsieur le président, pas seulement dans cet hémicycle.

J'apporterai ma contribution, monsieur le président, je vous le promets !

Oui, il faut que le débat s'anime, en utilisant les moyens d'aujourd'hui. D'une certaine manière, on peut parler de « e-démocratie », de démocratie électronique. Tout à l'heure, à la tribune, notre collègue Franck Riester s'est livré à une prestation de qualité – même s'il était totalement à côté de la plaque par rapport à ce que nous, nous pensons ! Personne ne peut nier qu'il a défendu un point de vue, le vôtre et celui des privilégiés.

Reste, madame la ministre, que tous ceux que ce sujet intéresse ne peuvent pas être dans les tribunes.

Heureusement, ils peuvent nous suivre grâce à Internet – et je constate que l'appel que j'ai lancé aux internautes a déjà été entendu.

Je ne suis pas aussi rompu que Franck Riester à la pratique d'Internet.

Ces jeunes aiment prendre des initiatives : ainsi, ils ont mis en place des liens pour accéder plus facilement à votre site, madame la ministre.

Il reste que Franck Riester pâtit d'une injustice.

Franck Riester est un des espoirs de l'UMP et porte les intérêts des privilégiés ; or il n'est pas encore destinataire des mails des jeunes du pays.

Je m'adresse aux jeunes internautes qui suivent notre débat en direct : adressez-vous à tous ceux qui ne vous écoutent pas, qui ne vous entendent pas, envoyez-leur des mails qu'ils liront, à défaut de vous entendre !

[...]

Madame la ministre, permettez-moi de m'étonner qu'après la tumultueuse et laborieuse adoption de la loi DADVSI, nous soyons à nouveau réunis pour discuter d'un texte sur l'Internet, alors que le précédent, qui a d'ailleurs fait l'objet de multiples controverses, était en partie inapplicable.

Je constate d'ailleurs que si l'on a beaucoup parlé d'études d'impact et d'évaluation dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, il n'en a jamais été question pour ce texte. Là, c'est le vide sidéral ! Il est vrai que son évaluation serait une forme d'autocritique accablante. Certes, vous n'étiez pas ministre de la culture en 2005, mais un de vos cousins politiques occupait votre poste et M. Sarkozy était alors membre du Gouvernement.

Quoi qu'il en soit, la promesse du Gouvernement de mettre en place une plate-forme publique de téléchargement « visant à la diffusion des œuvres des jeunes créateurs dont les œuvres ne sont pas disponibles à la vente sur des plateformes légales et la juste rémunération de leurs auteurs » n'a même pas été tenue. Alors que, je le répète, aucune évaluation publique n'a permis jusqu'alors de mesurer l'impact à moyen terme de ce texte, vous voilà, madame la ministre, en service commandé. Car vous n'appartenez pas à la famille de Gribouille et, si cela n'avait tenu qu'à vous, vous ne nous auriez pas présenté un texte aussi mal préparé, sans avoir dressé un bilan de la loi précédente. Mais, sa majesté impériale ayant demandé et validé lui-même le rapport Olivennes, vous sortez de votre chapeau une autre loi sur Internet et la création, qui est, au mieux, inopportune et inutile, au pire, perverse et liberticide.

Avant d'aborder les points les plus problématiques de votre projet de loi, notamment la création de la Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet, j'aimerais tordre le cou à quelques idées, qui, si elles ont, pour les grandes maisons de disque, l'avantage de légitimer leur stratégie d'appropriation du formidable outil qu'est Internet, n'en sont pas moins fausses.

M. le Président de la République a déclaré récemment que « le clonage et la dissémination des fichiers ont entraîné depuis cinq ans […] la ruine progressive de l'économie musicale en déconnectant les œuvres de leurs coûts de fabrication et en donnant cette impression fausse que, tout se valant, tout est gratuit. » Il est vrai qu'en matière de gratuité, le Président de la République est un expert, dès lors qu'il s'agit de lui-même.

[Et de ses vacances !] Notamment, mais pas uniquement. Pour le reste, c'est M. Je-sais-tout...

En effet, la plupart des études commises sur le sujet ne parviennent pas à prouver le lien entre, d'une part, téléchargement et, d'autre part, baisse des ventes de CD, de places de cinéma ou de la consommation de biens culturels, au contraire.

Comme l'ont écrit les membres de la Quadrature du Net, « même les études du ministère de la culture sur les usages d'Internet font apparaître que les populations jeunes, fortement utilisatrices d'Internet, parmi lesquelles on trouve une forte proportion de partageurs de fichiers, ont une fréquentation des salles de cinéma et des concerts accrue et une consommation de biens culturels qui n'est pas réduite, voire accrue ». C'est une étude du ministère de la culture, monsieur Gosselin !

Votre conception de la rationalité me dépasse ; elle est aussi ferme qu'une motte de beurre de la Manche !

Je le sais, monsieur Gosselin. C'est aussi mon pays !

S'il est vrai que l'on n'a jamais autant téléchargé sur Internet, la fréquentation des salles de cinéma n'a jamais été aussi importante. Il semblerait que seul le temps passé devant la télévision ait été réduit. Peut-être est-ce là ce qui gêne notre président de la République, qui s'arroge le droit de nommer les présidents des sociétés d'audiovisuel public et de se produire trois fois en prime time depuis janvier 2009.

En effet, si le nombre de téléspectateurs baisse, la valeur marchande de la publicité – que le Président de la République avait promis à ses amis de transférer des chaînes publiques vers les chaînes privées – sera moindre.

Compte tenu de ce manque à gagner, on peut penser que ses amis vont de nouveau tendre la main. Qu'ils ne s'inquiètent pas, le Président de la République sait toujours faire preuve d'imagination, dès lors qu'il s'agit de leur faire plaisir. Nous devrons donc bientôt, à n'en pas douter, examiner de nouveaux projets de loi destinés à les satisfaire.

On aurait pu imaginer que le Gouvernement veuille faire respecter la loi et le droit d'auteur en assimilant le téléchargement à du vol. Mais, après l'affaire polémique de l'utilisation du tube du groupe de rock MGMT lors des meetings de l'UMP sans l'autorisation de ses ayants droit, permettez-moi d'en douter, madame la ministre !

Alors, quoi ? Cette loi a-t-elle pour but de protéger les artistes interprètes et de favoriser la culture ? Quand on sacrifie le statut des intermittents du spectacle, ce qui nuit particulièrement à la création musicale et aux compagnies de spectacle vivant, il est peu crédible de s'autoproclamer défenseur de la création.

La création, particulièrement sur Internet, que ce soit avec les logiciels libres ou les initiatives pour une diffusion libre des œuvres par leurs auteurs eux-mêmes et sans intermédiaire, se heurte encore et toujours à l'hégémonie des grandes sociétés de production, comme Universal, qui soutiennent votre loi.

Elles savent non seulement de quoi elles parlent, mais aussi et, surtout, elles savent compter – et compter sur vous. Sur ce point, elles ont raison, car vous ne leur faites jamais défaut quand elles vous appellent à la rescousse.

Ces majors, qui n'ont fait aucun effort pour diversifier l'offre sur Internet, ont été dépassées par la vivacité et la créativité des internautes qu'elles veulent désormais brider.

Mais restons-en aux faits : si la vente de CD a en effet diminué, je vous l'accorde, c'est bien parce qu'ils sont devenus des produits de consommation quasiment luxueux. Leur prix n'a pas changé depuis vingt ans, à l'inverse de tous les autres produits numériques et de haute technologie comme les ordinateurs ou les lecteurs audio. Pourquoi ? Parce que les majors s'en sont mis plein les poches : elles ont continué à engranger des bénéfices exponentiels.

Votre loi, inspirée par Denis Olivennes, ancien membre du comité exécutif de Vivendi-Universal et ancien directeur de la Fnac – qui, soit dit en passant, va supprimer 400 postes en France...

[À cause du développement du téléchargement illégal !] Allons, monsieur le rapporteur, la situation aurait-elle changé de façon significative en quelques mois ?

[Elle évolue très rapidement !] Bien sûr que non ! Les amis du Président utilisent les circonstances pour apporter de l'eau à votre moulin. C'est cela la vérité et je sais bien qu'elle vous gêne !

Comment expliquez-vous donc que Total, malgré 14 milliards de bénéfices, licencie ? Si des entreprises de ce type se sentent autorisées à agir ainsi, c'est qu'elles savent qu'elles n'ont rien à redouter de vous et que vous n'avez rien à leur refuser.

Si la vente de CD a baissé, c'est à cause des prix prohibitifs pratiqués par les majors. Universal Music, Sony, EMI ou Warner continuent de dicter leurs conditions sur le marché de la musique et se taillent la part du lion : 50 % de la vente des CD et 60 % de la vente des fichiers musicaux. Des chiffres que vous vous êtes bien gardés de nous donner. Alors qu'Universal Music a fait plus de 408 millions de bénéfices en 2008, en augmentation de 21,8 % par rapport à l'année précédente, seulement 3 % des auteurs-interprètes perçoivent un montant de droits au moins égal au SMIC – Didier Mathus l'a rappelé.

Disons-le tout net : rien dans votre loi ne concerne la rémunération juste et équilibrée des artistes-créateurs ! L'argent, il y en a, mais l'important, c'est, comme disent les jargonneux, de le « flécher » dans le bon sens : de ceux qui en ont beaucoup vers ceux qui n'en ont pas. Là serait la justice ; mais, bien évidemment, c'est un mot que vous n'avez jamais trouvé dans votre dictionnaire de classe.

Vous pouvez toujours rire de votre politique, monsieur Gosselin, mais n'oubliez pas que, pendant ce temps-là, il y a des gens qui souffrent, y compris dans la Manche.

[À Montreuil aussi !] À ceci près que le député de Montreuil ne défend pas les intérêts des adversaires des pauvres gens.

Votre projet de loi, madame la ministre, prévoit que les personnes qui téléchargent ou échangent des œuvres sur Internet se voient désormais appliquer des sanctions selon le mode de la riposte graduée, un terme emprunté au vocabulaire de la guerre froide !

Après l'envoi de deux lettres recommandées, la ligne Internet sera coupée pour une durée maximale d'un an, sans toutefois que son paiement à l'opérateur, en l'état actuel de votre texte, soit suspendu. C'est, en somme, une sorte de double peine. On imagine aisément les conséquences dramatiques que cela suppose de nos jours, alors que beaucoup de nos activités quotidiennes et professionnelles dépendent de cet outil. Après une coupure de ligne, comment feront les étudiants en quête de documentation ou les salariés qui travaillent chez eux ? De surcroît, la suspension pourra affecter toute une famille, devenant ainsi une sanction collective, ce qui est inacceptable.

C'est une peine qui semble quelque peu disproportionnée par rapport au délit de diffusion de la culture !

Par ailleurs, tout cela se fera dans le cadre d'une procédure qui ne permettra pas aux usagers dont l'adresse IP a été identifiée comme ayant servi au téléchargement de se défendre. Ils ne pourront pas non plus obtenir d' informations sur les faits qui leur sont reprochés avant la décision de sanction. À ce propos, on peut faire confiance à l'un des créateurs d'Internet, l'américain Vinton Cerf, quand il affirme que 30 % à 40 % des ordinateurs en fonction sur le réseau sont piratés. Comment sécuriser l'accès à Internet si l'ordinateur est lui-même infecté et utilisé à distance ? Peut-on demander aux particuliers de réussir là où les professionnels échouent ? Allez-vous prendre le risque de punir en majorité des innocents ? Qui peut dire que ce ne sont pas de vrais problèmes ?

Les internautes sont, pour la plupart, incapables de faire face aux rapides développements des techniques de piratage qui rendent la sécurisation d'une ligne Internet quasiment impossible, sauf bien sûr ceux qui organisent le trafic et la contrefaçon à grande échelle. Pour ceux-là, laissez les juges faire leur travail !

Du reste, les effets pervers de ces procédures de contrôle informatique ne tarderont pas à se faire sentir. Les pirates chevronnés ne manqueront pas de mettre rapidement en œuvre des moyens de contournement utilisables pour d'autres délits plus graves de cybercriminalité impliquant les réseaux de pédopornographie ou les cybermafias, ce qui risque de compliquer grandement la tâche des autorités.

Cette mesure coûteuse – l'État prévoit plus de mille coupures par jour, précédées de deux lettres recommandées, soit plus de 6 millions d'euros de dépenses par an – ne sanctionnera donc que les internautes de bonne foi, qui ne pourront être protégés par les dispositions habituellement prévues par la Constitution et la loi pénale, celles qui instituent la présomption d'innocence, celles qui donnent le droit à un procès équitable, celles qui assurent le respect de la vie privée, celles qui garantissent un accès à la culture pour tous.

Je ne m'attarderai pas plus longtemps sur des considérations d'ordre technique, sur lesquelles nous aurons l'occasion de revenir au cours de la discussion des articles. Permettez-moi seulement d'exprimer mes doutes sur l'opportunité de sanctionner les usagers sur le fondement d'un défaut de sécurisation de leur connexion. Que n'avez-vous, dans votre logique de répression, ciblé les fournisseurs d'accès à Internet qui ont mis en avant, et continuent de le faire, le haut débit de la connexion comme accroche de leur promotion ? Ils font leurs choux gras d'une offre, légale ou non, de produits ou de biens culturels. Pourquoi culpabiliser les internautes ? Pourquoi ne pas responsabiliser au préalable les acteurs d'un système économique désuet, nuisible à la culture en général, défavorable aux artistes en particulier, quand ils ne sont pas liés aux sociétés de production dominantes ?

On ne sanctionne pas les financiers voyous, qui dans leur course aux profits maximum ont accéléré la crise financière, à l'instar de Charles Milhaud dont on connaît les errements à la tête des caisses d'épargne – 2 milliards d'euros de perte en 2008 – et la participation à la création de Natixis, dont l'action vaut maintenant moins d'un euro contre 19 euros à sa création, et l'on est prêt à faire la chasse aux internautes, aux citoyens ordinaires, en bafouant les lois les plus élémentaires du respect de la vie privée ! Comme quoi, mieux vaut être un grand délinquant qu'un honnête citoyen qui utilise les technologies actuelles !

Madame la ministre, avec votre loi, vous illustrez parfaitement les vers de La Fontaine dans Les animaux malades de la peste que vous avez certainement appris sur les bancs de la communale :

« Selon que vous serez puissant ou misérable,

« Les jugements de cour vous rendront blanc ou noir.»

[Je pensais plutôt à : « Ils ne mouraient pas tous, mais tous étaient frappés » !] Monsieur le président, M. Gosselin veut seulement nous montrer qu'il n'est pas atteint de la maladie d'Alzheimer. Mais au lieu d'essayer de se remémorer ces poèmes appris à l'école, il ferait mieux d'en tirer la substantifique moelle. Ne voyez vous donc pas que ces vers vous placent devant vos turpitudes ! Revenez donc à la morale et à la défense de l'intérêt collectif.

Ce qui paraît le plus grave à la lecture de ce projet de loi, madame la ministre, c'est l'essence même de la Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet et son fonctionnement. Composée de neuf membres dont quatre sont directement nommés par le Gouvernement, elle permet tout bonnement de se passer de l'autorité du juge. De plus, elle ne peut être saisie que par le Centre national de la cinématographie, les organismes de défense professionnelle ou les sociétés de perception, et non par les artistes indépendants dont les droits ne seront pas protégés par cette loi.

Vous nous le démontrerez dans la suite de nos débats. Mais il vous faudra avancer des arguments autrement plus convaincants que ceux que vous avez développés jusqu'à présent.

Quand on sait que les majors concentrent dans leurs mains plus de 70 % de la production musicale et audiovisuelle, ce projet de loi, pour elles, ce n'est même pas du sur-mesure, c'est de la haute couture !

La Haute autorité pourra surveiller l'ensemble des communications sur l'adresse visée et décidera seule de l'application de la sanction que les fournisseurs d'accès seront sommés d'exécuter. Cela pourrait rappeler aux plus anciens d'entre nous certaines juridictions d'exception comme la Cour de sûreté de l'État supprimée par la gauche en août 1981.

Ce big brother de l'informatique permettra de s'immiscer dans la vie privée des internautes à travers leurs réseaux.

En condamnant sans procès, vous niez le rôle du magistrat. Depuis deux ans, nous devrions pourtant en avoir l'habitude : contrôle tatillon de l'application des peines plancher, convocations à la chancellerie, parfois même nuitamment, comme pour le procureur de Nancy, suppression du juge d'instruction renforçant l'assujettissement de la justice au parquet. Hélas ! les exemples ne manquent pas.

Votre politique est cohérente : il s'agit toujours de remplir les poches des privilégiés.

Pour cela, il faut bâillonner les libertés, les réduire. Vous l'avez fait hier avec la loi sur l'audiovisuel et la loi modifiant le règlement de notre assemblée, vous le faites aujourd'hui avec les internautes !

11/03/2009 Débats HADOPI : droits fondamentaux, échanges sur Internet, question préalable, accords de l'Élysée, streaming, industrie du divertissement

M. Franck Riester n'est pas sans talent, ce qui est tout à son honneur. Toutefois le nouveau député qu'il est n'a pas à utiliser la Déclaration des droits de l'homme comme linceul de nos libertés.

Par ailleurs, madame la ministre, je tiens à rappeler ce que M. le président de l'Assemblée nationale a lui-même souligné, à savoir que les internautes pourront suivre les débats des représentants de la nation, que nous sommes, de bout en bout.

Monsieur le président, de même qu'il y a eu Gutenberg au XVe siècle, il y a Internet aujourd'hui. J'appelle tous les internautes de France et d'ailleurs à faire part immédiatement de leur opinion, par courriels, à Mme Albanel et aux trois rapporteurs, puisque M. Franck Riester a affirmé que les internautes étaient favorables au projet de loi.

[...]

Madame la ministre, comme l'a dit tout à l'heure l'un de nos collègues, Nicolas Sarkozy paie ses dettes !

Cessez d'invoquer les accords de l'Élysée. En situant un accord médiocre dans un lieu prestigieux, vous essayez de lui donner l'honorabilité qui lui manque. Or je ne connais qu'un accord qui mérite d'être localisé à l'Élysée, c'est le traité de 1963 entre le général de Gaulle et le chancelier Audenauer.

Assimiler comme vous le faites votre accord à celui-là est une atteinte portée à la mémoire du général, qui n'est plus une référence pour vous.

Monsieur Gosselin, les accents que vous utilisiez tout à l'heure me faisaient penser à Jdanov. Ce n'est pas parce qu'on est professeur de droit qu'il ne faut pas garder les pieds sur terre. Comme professeur de droit, vous devriez savoir qu'on ne fait pas rentrer le réel dans le droit, mais qu'on part de l'examen concret de la réalité concrète, comme disait Marx, pour en déduire le droit !

Mais vous pouvez être professeur de droit et être ignorant en philosophie.

Madame la ministre, vous avez évoqué la morale – vous l'avez suggérée plutôt que d'y faire explicitement référence. C'était effectivement préférable : la morale, on peut en parler, mais on n'est convaincant que si on la pratique. Or que faites-vous, en pratique ?

Vous voulez faire payer les internautes : vous ne le dites pas comme cela, mais tout votre projet va dans ce sens. Mais il faudrait vous comporter ainsi avec tout le monde ! Vous dites : pas de laisser-faire. Mais alors, pourquoi laissez-vous faire les banquiers ? Pourquoi laissez-vous faire Carlos Ghosn ? Pourquoi laissez-vous faire les actionnaires, les spéculateurs, les fraudeurs, les paradis fiscaux qui ruinent le pays ?

eux-là, ce sont les copains : on n'y touche pas. Vous vous acharnez donc sur ces pauvres internautes, qui ne sont pas de la même étoffe que vos amis.

Ils veulent simplement avoir accès à des chansons, à de la musique ou à des films – et vous voulez les en priver ?

Madame la ministre, vous faisiez tout à l'heure référence à ces dix mille signataires. Parlons-en : ce sont vos victimes, car ce sont pour beaucoup des intermittents du spectacle que vous avez crucifiés !

Pourquoi ont-ils signé ? Votre question est excellente, monsieur Apparu, et je vais vous répondre. Regardez comment fait le MEDEF : il met en avant les petits artisans et les petits patrons ; et pendant ce temps-là, Mme Parisot reste sur le mont Aventin, et regarde la progression de ces fantassins qui défendent des intérêts qui ne sont pas les leurs.

Eh bien, ces dix mille signataires sont aussi des fantassins : on ne leur a pas donné les moyens de comprendre.

Nous ferons des propositions pour protéger les internautes et aussi le droit d'auteur ; car nous défendons, nous, la création, et pas seulement les coffres-forts.

Pour être tout à fait sincère, les coffres-forts nous intéressent aussi, à condition de les ouvrir pour faire passer l'argent qu'ils contiennent vers les caisses publiques.

Madame la ministre, votre texte est irréel. Vous voulez encadrer le téléchargement ; mais on peut maintenant utiliser le streaming, et on peut le faire sans que vous puissiez rien contre !

On ne fait pas une loi quand la contrainte n'est pas crédible, quand la loi n'est ni réaliste, ni juste.

Quant aux bornes wifi, je vous fais une proposition : il faut installer une webcam au-dessus de la borne wifi, pour savoir qui va télécharger. Et vous inscrirez tout cela dans le fichier Edvige : vous ferez un fichier iconographique, avec la photo de tous ceux qui ont voulu télécharger.

Pourquoi est-ce que je traite votre loi par la dérision ? C'est parce qu'elle est dérisoire. On s'acharne sur les petits pour privilégier les gros, comme d'habitude ; mais les internautes n'accepteront pas le bâillon.

Je le dis encore, et je sais que vous êtes d'accord avec moi, monsieur le président : puisque vous prétendez parler pour les internautes, madame Albanel, je leur demande de faire entendre leur voix jusqu'au cabinet des ministres, pas loin d'ici. Bloquez le site de Mme la ministre, bloquez le site des rapporteurs, faites-vous entendre et nous allons porter votre voix, à vous qui ne pouvez pas vous exprimer dans cet hémicycle !

09/03/2006 Débats DADVSI : copie privée, licence globale, financement de la culture

Monsieur le ministre, vous voulez limiter le nombre de copies téléchargées : en vérité, vous nous avez téléchargés, parce que depuis le début du débat vous ne cessez de répéter la même chose, avec des mots différents.

Vous dites que nous sommes pour un nouvel impôt : pas du tout !

J'en reviens, monsieur le ministre, à l'impôt nouveau que, dites-vous, nous voulons prélever. Il n'en est rien. Mais vous, avec vos ambiguïtés, vous voulez privatiser les impôts en roulant pour les majors !

Je n'ai pas dit, et surtout pas de vous, monsieur Martin-Lalande, que vous étiez un domestique, mais je dirais de certains de vos collègues qu'ils sont des laquais du grand capital !

J'ai simplement voulu dire que le Gouvernement ne parvenait pas à discipliner sa majorité. Les discours sont en effet contradictoires : certains d'entre vous, comme Mme Boutin, sont sensibles aux aspirations des jeunes, tandis que d'autres ne cherchent qu'à complaire à ceux qui les ont délégués ici : je ne parle pas de leurs électeurs, qui parfois se trompent, mais des intérêts qu'ils défendent en permanence.

Il existait pourtant une solution simple, qui avait l'assentiment du président de notre assemblée : créer une mission parlementaire. Un sujet aussi complexe méritait une réflexion préalable.

Personne ne conteste la complexité du sujet, mais nous sommes obligés de transposer la directive.

Qu'est-ce qui nous empêche de prendre un peu de temps pour trouver un minimum de consensus sur un sujet d'une telle difficulté ?

Vous nous assurez, monsieur le ministre, que vous êtes conscient des évolutions technologiques. Tout le monde en est conscient, mais qui peut les anticiper avec certitude ? Dans un autre domaine, qui peut dire comment va évoluer le virus de la grippe aviaire ? Personne !

Mes chers collègues, vous ne pouvez pas ignorer les aspirations des jeunes. Il faut sortir des affirmations et des invectives pour organiser enfin le débat dans le pays. Nous avons entendu des artistes très divers : Johnny Hallyday - comme si ce contribuable belge pouvait s'exprimer au nom de l'intérêt général ! Quel point commun y a-t-il entre lui et Costa Gavras ou Robert Guédiguian, artistes tout aussi estimables et qui doivent être écoutés. Il faut à la fois préserver l'aspiration des jeunes à la liberté et les droits des créateurs. La création doit être rémunérée, mais dans des conditions équitables. Vous ne cessez de brandir l'épouvantail de la licence globale : définissons ensemble un contenu sur lequel nous pourrons discuter.

Je ne comprends pas, monsieur le ministre, que vous refusiez de lever l'urgence, puisque vous expliquez par ailleurs que nous avons tout le temps pour débattre.

[...]

Monsieur le ministre, je voudrais savoir, s'agissant des œuvres téléchargées, des CD, de toute la diffusion culturelle, quelle est, sur 99 euros, la part qui revient aux artistes, aux créateurs, et la part qui revient aux producteurs.

Nous avons besoin d'être éclairés et que le ministre nous dise la vérité sur la répartition de ce qui va aux uns et aux autres. Je suis sûr que ceux qui nous regardent en ce moment, les internautes, les jeunes, comprendront mieux alors pour qui travaille le Gouvernement.

07/03/2006 Débats DADVSI : lobbies, téléchargement, exceptions au droit d'auteur

Monsieur le ministre, vous avez repoussé la licence globale sous prétexte qu'elle ne profiterait pas aux internautes. Vous êtes responsable de la situation dans laquelle nous nous trouvons. Le sujet est délicat, incontestablement, mais nous avons le sentiment que vous cédez, sans faire la part des choses, à la pression des lobbies et que vous n'anticipez pas le futur. Comme le dirait Mme Boutin, vous ne chaussez pas les lunettes de l'avenir et vous n'anticipez pas les mutations que nos collègues, en particulier Frédéric Dutoit, ont évoquées.

Je regrette que, sur un tel sujet, vous n'ayez pas accepté que nous travaillions de façon plus méticuleuse, en écoutant les uns et les autres.

Monsieur le président, que se passera-t-il si un internaute se soustrait tout à fait légalement aux règles que le Gouvernement nous invite à adopter, par exemple en téléchargeant à partir d'un site russe ?

Monsieur le ministre, comment pourrez-vous, dans les conditions que vous prétendez garantir aux artistes, protéger le droit d'auteur quand les internautes téléchargeront via un site russe qui, lui, fonctionnera légalement ?

Quelle solution envisagez-vous ?

[...]

Monsieur le ministre, vous évacuez les problèmes. Nous voulons bien vous croire, mais nous avons besoin de concret. Avec tout le respect que nous devons à votre fonction et à votre personne, je doute que vous vous montriez efficace sur un sujet aussi délicat alors que vous nous menez en bateau sur la question des intermittents. Vous prétendez que l'accord est signé : dans ces conditions, pourquoi diable ne nous en donnez-vous pas copie, afin que nous puissions nous faire une opinion par nous-mêmes ?

Comment aborder la question des exceptions sans évoquer celle qui est relative à la recherche et à l'enseignement ? Vous nous dites que le problème est réglé : soit ! J'estime néanmoins que cette exception doit figurer dans la loi et ne pas seulement faire l'objet d'un protocole ou d'un accord. Je suis comme saint Thomas : j'ai besoin de voir pour croire. Le Gouvernement prétend avoir clarifié le régime des exceptions et trouvé une solution d'équilibre. À lire la rédaction du texte, il s'agirait plutôt de mesures en trompe-l'œil.

Ainsi, monsieur le ministre, vous proposez d'autoriser les bibliothèques à effectuer des copies d'œuvres protégées, dès lors qu'elles n'en tirent aucun avantage commercial. Fort bien ! Si vous avez conclu un tel accord, montrez-le nous et, surtout, expliquez-nous pourquoi ce droit de copie est limité aux œuvres qui ne sont plus disponibles à la vente ou dont le format de lecture est devenu obsolète ! Une véritable exception consisterait à admettre que les missions des bibliothèques passent par le droit de copie numérique de l'ensemble des œuvres. Démontrez-nous que la question est réglée, je le répète, en nous donnant le texte !

22/12/2005 Débats DADVSI : lobbies

Monsieur le ministre, je n'ai pas participé au débat jusqu'à présent,...étant occupé notamment par la loi que nous propose le Gouvernement sur le logement et par certains aspects de la loi de finances. Je m'y suis cependant intéressé, car mon fils, qui a quinze ans et demi, ...

Vous avez donc réussi, monsieur le ministre, à susciter non seulement l'intérêt des intermittents du spectacle - et ce depuis déjà un certain temps -, mais aussi celui de tous les jeunes de notre pays. Vous le faites malheureusement de façon peu sympathique, à la faveur d'une position liberticide. Certes, vous connaissant, je ne doute pas de vos intentions. Cependant, le projet de loi que vous nous présentez pourrait se révéler dangereux, et donne, en tout état de cause, le sentiment d'avoir été mal préparé.

Vous savez d'ordinaire prendre votre temps, monsieur le ministre. D'ailleurs, c'est ce que vous dites avec constance aux intermittents : il faut prendre le temps !

Pourquoi, dès lors, tentez-vous de nous faire avaler ce texte juste avant les vacances de Noël, de la même façon que nos grands-mères, prétendument pour notre bien, nous faisaient avaler de l'huile de foie de morue ?

Instituteur de formation, je sais par expérience que faire comprendre un concept aux enfants nécessite souvent de raisonner par analogie.

Peut-être, mais moi, j'ai dit : analogie. Ne poussez donc pas trop loin la comparaison... Or, si je raisonne par analogie, partant du constat que vous offrez de facto une position monopolistique aux majors, ...

Mais laissez-moi poursuivre ma démonstration, vous me direz ensuite si elle n'est pas fondée. Nous avons tout lieu de nous inquiéter de ce primat que vous accordez aux majors : Sony, Apple, Microsoft, notamment.

Raisonnant, donc, par analogie, je pense à ce que fait Monsanto en agriculture : la stérilisation des semences lui confère un monopole.

Face à cela, il faut protéger la liberté et l'universalité. Quelques grands artistes sont certes venus à votre secours, monsieur le ministre, mais il faut regarder à qui ils sont liés...

C'est un texte global. Bien que nous soyons à la veille de Noël, on ne peut le couper en tranches comme un morceau de foie gras.

Il s'agit de préserver les principes de liberté et d'universalité et de nous défendre contre tout ce qui conduit à une forme de mondialisation en donnant la primauté aux majors.

Je terminerai donc mon propos, monsieur le ministre, en notant que vous savez prendre votre temps quand il le faut, parfois même avec excès : la situation des intermittents, que vous continuez à refuser d'entendre, en est la parfaite illustration. Eh bien, prenez votre temps sur ce sujet également ! N'essayez pas de faire passer votre texte à l'esbroufe.

Reprenons toute la réflexion depuis le début. Aussi conclurai-je par une suggestion.

Depuis 2002, à plusieurs reprises, il a semblé bon à notre assemblée, lorsqu'elle s'est trouvée confrontée à des situations qui pouvaient le justifier, de se saisir elle-même et de mener ses propres investigations. C'est là donner une plus grande place au Parlement. Pourquoi notre assemblée ne constituerait-elle pas une de ces missions que le président Debré affectionne et qui permettrait de remettre l'ouvrage sur le métier ? En cette période de réveillon, monsieur le ministre, ce serait mieux que de servir la soupe aux majors !