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(Patrick Bloche - Contrefacteur "pirate" / Contrefacteur "partageur" (00;42;52))
(Interdiction de souscrire un nouvel abonnement : Jean-Pierre Brard - Abonnement à un simple service de communication électronique (00;45;14))
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===Catherine Lemorton - Contourner l'interdiction (00;35;02)===
 
===Catherine Lemorton - Contourner l'interdiction (00;35;02)===
 
* Mme Catherine Lemorton ''(défense de l’amendement n° 332)''.<br/>"Madame la ministre vous disiez tout à l’heure à M. Brard que son amendement était mal écrit – ce n’était pas mon avis, mon cher collègue –, vous devriez plutôt vous intéresser à la façon dont est rédigé votre projet de loi ; on voit d’ailleurs ce que le Conseil constitutionnel a fait de votre première version !<br/>Monsieur le ministre, vous vous interrogiez sur la rétention. La rétention de sûreté, je l’ai déjà dit, permet d’enfermer des individus pour des faits dont ils pourraient être les auteurs dans le futur. Les mesures que nous examinons sont sans commune mesure, mais il s’agit, une fois encore, d’un dispositif très répressif.<br/>Je veux bien que vous soyez chargé d’envoyer des signes aux amis de l’exécutif, à une poignée de personnes qui attendent le versement de leurs droits d’auteurs, mais tout saute tellement aux yeux, c’est tellement gros, que cela devient très suspect.<br/>Effectivement, et cela nous rappelle un projet de loi tout récent !<br/>'''Il est toujours aisé à une personne de mauvaise foi de contourner l’interdiction de souscrire un nouvel abonnement, d’autant que celle-ci peut avoir ouvert plusieurs abonnements préalablement à sa condamnation, y compris sous des pseudonymes et des noms d’emprunt. Comment vérifierez-vous ? En fait, il y aura un traitement inégal de nos concitoyens, entre, d’une part, ceux qui ont les moyens de disposer de plusieurs abonnements ou qui savent contourner les règles parce qu’ils sont experts et, d’autre part, ceux qui n’ont pas les moyens, qui ne sont pas des experts, et qui seront les premiers touchés.'''"
 
* Mme Catherine Lemorton ''(défense de l’amendement n° 332)''.<br/>"Madame la ministre vous disiez tout à l’heure à M. Brard que son amendement était mal écrit – ce n’était pas mon avis, mon cher collègue –, vous devriez plutôt vous intéresser à la façon dont est rédigé votre projet de loi ; on voit d’ailleurs ce que le Conseil constitutionnel a fait de votre première version !<br/>Monsieur le ministre, vous vous interrogiez sur la rétention. La rétention de sûreté, je l’ai déjà dit, permet d’enfermer des individus pour des faits dont ils pourraient être les auteurs dans le futur. Les mesures que nous examinons sont sans commune mesure, mais il s’agit, une fois encore, d’un dispositif très répressif.<br/>Je veux bien que vous soyez chargé d’envoyer des signes aux amis de l’exécutif, à une poignée de personnes qui attendent le versement de leurs droits d’auteurs, mais tout saute tellement aux yeux, c’est tellement gros, que cela devient très suspect.<br/>Effectivement, et cela nous rappelle un projet de loi tout récent !<br/>'''Il est toujours aisé à une personne de mauvaise foi de contourner l’interdiction de souscrire un nouvel abonnement, d’autant que celle-ci peut avoir ouvert plusieurs abonnements préalablement à sa condamnation, y compris sous des pseudonymes et des noms d’emprunt. Comment vérifierez-vous ? En fait, il y aura un traitement inégal de nos concitoyens, entre, d’une part, ceux qui ont les moyens de disposer de plusieurs abonnements ou qui savent contourner les règles parce qu’ils sont experts et, d’autre part, ceux qui n’ont pas les moyens, qui ne sont pas des experts, et qui seront les premiers touchés.'''"
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===Jean-Pierre Brard - Abonnement à un simple service de communication électronique (00;45;14)===
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M. Jean-Pierre Brard ''(défense de l’amendement n° 840)''.<br/>"Monsieur le président, vous voulez accélérer le rythme, alors que nous faisons des efforts évidents, qui, hélas ! ne sont pas récompensés par nos interlocuteurs. Monsieur Riester, quand quelqu’un qui a de la curiosité intellectuelle ne comprend pas quelque chose, il se demande pourquoi, afin de dépasser ses propres blocages et d’accéder au royaume lumineux de la connaissance.<br/>Mais venons-en à l’amendement n° 840. En coupant l’accès à internet, vous couperez également l’accès aux services de communication électronique. '''Or ces derniers sont indispensables à la participation à la vie de la cité. Je vous rappelle que le Conseil constitutionnel a reconnu que le droit de communiquer était un droit fondamental.''' Les services de communication électroniques sont en effet essentiels à l’exercice de la citoyenneté, à la liberté d’expression et à la protection de la vie privée.<br/>Monsieur le ministre, comment pouvez-vous justifier qu’une personne privée d’accès à internet ne puisse au moins se réabonner à un simple service de communication électronique ? Cela lui permettrait de maintenir un minimum de lien social avec le monde, durant la peine qu’il purgera – comme vous avez des problèmes avec l’expression « centre de rétention », je vais en utiliser une autre, qui vous parlera davantage – dans le goulag numérique que vous instaurez. Des dispositions ont été acceptées par les banquiers, qui ne sont pas vraiment des philanthropes ni des gens tendres. Or vous refusez d’en faire bénéficier des internautes qui auraient été imprudents. Un peu d’humanité, que diable ! Sortez de l’âge de la barbarie numérique !"
  
 
== Délit de contrefaçon==
 
== Délit de contrefaçon==

Version du 19 août 2009 à 18:18

Présomption de culpabilité

Catherine Lemorton - Citation de Me Eolas (00;06;37)

  • Mme Catherine Lemorton (défense de l’amendement n° 174).
    "Permettez-moi de citer les explications que donne Eolas, sur le site Journal d’un avocat, à propos de l’avis du Conseil constitutionnel : « La loi HADOPI met en cause la responsabilité de l'abonné par la simple constatation du piratage, qui suffit à mettre en branle la machine à débrancher, sauf à ce que l'abonné démontre que le piratage est dû à la fraude d'un tiers (je laisse de côté la force majeure, qui exonère de toute responsabilité sans qu'il soit besoin de le prévoir dans la loi, et l'installation du logiciel mouchard, qui au contraire interdit de facto à l'abonné d'invoquer la fraude d'un tiers). Preuve impossible à rapporter. Ce renversement de la charge de la preuve aboutit à faire de l'abonné mis en cause un coupable jusqu'à ce qu'il prouve son innocence. C'est prévu par le code pénal nord coréen, mais pas par le nôtre. Le législateur a imaginé ce mécanisme anticonstitutionnellement. » Les événements des dernières semaines ne donnent-ils pas raison à l’auteur de ces lignes ?
    M. le rapporteur bâille. On comprend qu’il soit fatigué. Pour lui éviter la peine d’une nouvelle sanction du Conseil constitutionnel, je lui suggère d’émettre un avis favorable à l’amendement n° 174, qui propose d’abroger l’article L. 336-3 du code de la propriété intellectuelle."

Interopérabilité

Jean-Pierre Brard - Interopérabilité / Centres de rétention (00;15;04)

  • M. Jean-Pierre Brard (défense de l'amendement n° 838).
    "Je les défendrai l’un après l’autre, monsieur le président. Procédons avec méthode ! En bon marxiste, j’examine les choses l’une après l’autre. Mais ce serait trop long à vous expliquer aujourd’hui. Restons-en à l’amendement n° 838.
    Il prévoit une exonération de responsabilité pour une personne qui n’aurait pas, suite à l’obligation qui lui en serait faite par la HADOPI, installé un logiciel de sécurisation en raison de leur inadaptation à son système d’exploitation. Je regrette que Lionel Tardy n’ait pas été mieux entendu, malgré la pertinence de son propos tout à l’heure. Mais je n’en dis pas plus, car je sens que je vais lui nuire.
    Nous retrouvons ici la question que j’ai posée à plusieurs reprises : pouvez-vous nous assurer que les logiciels de sécurisation seront interopérables ou qu’ils seront en nombre suffisant pour répondre à toutes les configurations ? C’est toujours le même problème d’inégalité des citoyens devant la loi et de l’insécurité juridique qui en découle, en raison du risque de sanctions qui, comme une épée de Damoclès, serait au-dessus de la tête de tous les internautes qui auraient l’outrecuidance d’utiliser des systèmes d’exploitation différents de celui développé par l’ogre Microsoft.
    Quant aux centres de rétention, monsieur le ministre, malgré mes répétitions vous n’avez pas bien saisi ce que j’ai dit, tandis que Mme Alliot-Marie, elle, connaît le sujet par cœur. Ce sont des centres où l’on met des honnêtes gens qui n’ont pas fait de mal, ce sont des honnêtes travailleurs dont le seul défaut est de ne pas avoir les bons papiers. D’une certaine manière, vous allez cantonner des internautes dans deux camps différents. Il y aura les privilégiés et les autres, mais on ne connaît pas le critère qui fait la différence."

Patrick Bloche - Interopérabilité / Logiciels libres (00;19;18)

  • M. Patrick Bloche (réponse aux avis de la commission et du Gouvernement).
    "Que le rapporteur et le ministre se contentent de dire « défavorable » aux deux amendements présentés par M. Brard me semble un peu court. Certes, nous sommes en fin de débat. Mais à partir du moment où vous imposez aux internautes – c’est la nouveauté de HADOPI 2 par rapport à HADOPI 1 – d’acquérir, installer et activer des moyens de sécurisation sous peine de responsabilité pénale, on ne peut répondre seulement « défavorable » à ces deux amendements qui rejoignent deux amendements que nous avons présentés plus tôt dans la discussion et qui visaient à ce que ces moyens de sécurisation soient gratuits afin que chaque citoyen soit à égalité devant la loi, quel que soit son niveau de revenu.
    Le second amendement est tout aussi important : si vous ne voulez pas faire supporter à la collectivité le coût de ces moyens de sécurisation, il faut au moins qu’ils soient interopérables. Pour que la loi s’applique, vous devez tenir compte des configurations techniques, de l’ancienneté du matériel dont disposent les utilisateurs et du fait que nombre d’entre nous ont développé les logiciels libres – l’Assemblée nationale en est le meilleur exemple. Cette interopérabilité était déjà un élément central du débat sur la loi DADVSI en 2005-2006. Il faut l’assurer. C’est pourquoi je trouve la réponse un peu courte."

Interdiction de souscrire un nouvel abonnement

Patrick Bloche - Sanction disproportionnée (00;30;52)

  • M. Patrick Bloche (défense de l’amendement n° 327).
    "J’ai repris mon souffle, monsieur le président. Cela dit, vous avez peut-être constaté que, depuis mardi matin, neuf heures trente, je ne l’ai guère perdu.
    Madame la garde des sceaux, je me permets de m’adresser à vous. Vous avez exprimé dans ce débat une conviction forte que nous partageons, à droite et à gauche de cet hémicycle : des règles existent, et quand on ne les respecte pas, on doit être sanctionné. Toutefois, l’essentiel est de savoir quelles sanctions appliquer.
    Si l’on veut que la loi soit comprise et qu’elle ait une vertu pédagogique, donc aussi dissuasive, il faut que la sanction soit proportionnée à l’infraction. Or trop souvent, dans ce projet de loi, il y a disproportion entre l’infraction commise et la peine correspondante. Que l’internaute qui a téléchargé illégalement risque deux ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende s’il souscrit un nouvel amendement, c’est presque ridicule ! D’autant plus que le rapporteur nous a confirmé que l’on n’était pas en mesure de connaître l’identité de ceux qui se réabonnaient, et qu’il y aurait donc ceux qui se feraient prendre, et les autres !
    Dans ce texte, que vous voulez pédagogique, la disproportion entre l’infraction et la sanction est telle que nous atteignons un nouveau niveau d’incohérence."

Catherine Lemorton - Contourner l'interdiction (00;35;02)

  • Mme Catherine Lemorton (défense de l’amendement n° 332).
    "Madame la ministre vous disiez tout à l’heure à M. Brard que son amendement était mal écrit – ce n’était pas mon avis, mon cher collègue –, vous devriez plutôt vous intéresser à la façon dont est rédigé votre projet de loi ; on voit d’ailleurs ce que le Conseil constitutionnel a fait de votre première version !
    Monsieur le ministre, vous vous interrogiez sur la rétention. La rétention de sûreté, je l’ai déjà dit, permet d’enfermer des individus pour des faits dont ils pourraient être les auteurs dans le futur. Les mesures que nous examinons sont sans commune mesure, mais il s’agit, une fois encore, d’un dispositif très répressif.
    Je veux bien que vous soyez chargé d’envoyer des signes aux amis de l’exécutif, à une poignée de personnes qui attendent le versement de leurs droits d’auteurs, mais tout saute tellement aux yeux, c’est tellement gros, que cela devient très suspect.
    Effectivement, et cela nous rappelle un projet de loi tout récent !
    Il est toujours aisé à une personne de mauvaise foi de contourner l’interdiction de souscrire un nouvel abonnement, d’autant que celle-ci peut avoir ouvert plusieurs abonnements préalablement à sa condamnation, y compris sous des pseudonymes et des noms d’emprunt. Comment vérifierez-vous ? En fait, il y aura un traitement inégal de nos concitoyens, entre, d’une part, ceux qui ont les moyens de disposer de plusieurs abonnements ou qui savent contourner les règles parce qu’ils sont experts et, d’autre part, ceux qui n’ont pas les moyens, qui ne sont pas des experts, et qui seront les premiers touchés."

Jean-Pierre Brard - Abonnement à un simple service de communication électronique (00;45;14)

M. Jean-Pierre Brard (défense de l’amendement n° 840).
"Monsieur le président, vous voulez accélérer le rythme, alors que nous faisons des efforts évidents, qui, hélas ! ne sont pas récompensés par nos interlocuteurs. Monsieur Riester, quand quelqu’un qui a de la curiosité intellectuelle ne comprend pas quelque chose, il se demande pourquoi, afin de dépasser ses propres blocages et d’accéder au royaume lumineux de la connaissance.
Mais venons-en à l’amendement n° 840. En coupant l’accès à internet, vous couperez également l’accès aux services de communication électronique. Or ces derniers sont indispensables à la participation à la vie de la cité. Je vous rappelle que le Conseil constitutionnel a reconnu que le droit de communiquer était un droit fondamental. Les services de communication électroniques sont en effet essentiels à l’exercice de la citoyenneté, à la liberté d’expression et à la protection de la vie privée.
Monsieur le ministre, comment pouvez-vous justifier qu’une personne privée d’accès à internet ne puisse au moins se réabonner à un simple service de communication électronique ? Cela lui permettrait de maintenir un minimum de lien social avec le monde, durant la peine qu’il purgera – comme vous avez des problèmes avec l’expression « centre de rétention », je vais en utiliser une autre, qui vous parlera davantage – dans le goulag numérique que vous instaurez. Des dispositions ont été acceptées par les banquiers, qui ne sont pas vraiment des philanthropes ni des gens tendres. Or vous refusez d’en faire bénéficier des internautes qui auraient été imprudents. Un peu d’humanité, que diable ! Sortez de l’âge de la barbarie numérique !"

Délit de contrefaçon

Patrick Bloche - Contrefacteur "pirate" / Contrefacteur "partageur" (00;42;52)

  • M. Patrick Bloche (réponse aux avis de la commission et du Gouvernement).
    "N’applaudissez pas !
    Madame la garde des sceaux, je vous remercie de nous avoir répondu et d’avoir précisé que le délit de contrefaçon couvrait uniformément le contrefacteur et l’internaute qui télécharge illégalement dans une logique de partage et d’échange de fichiers."

  • Mme Michèle Alliot-Marie.
    "Illégalement !"
  • M. Patrick Bloche.
    "Personne ne le conteste, madame la ministre. Seulement, il partage des fichiers pour avoir accès à des contenus culturels plus nombreux.
    Cela s’appelle l’accès à la culture pour tous, qui est l’un des deux piliers sur lesquels devrait reposer l’action de M. le ministre de la culture. Car la politique culturelle consiste à soutenir l’offre culturelle et à permettre l’accès à la culture du plus grand nombre.
    Toujours est-il que, pour des raisons financières, parce que les usages se sont développés ainsi, parce que l’offre légale était trop limitée, que de grandes maisons de production n’ont pas libéré leurs catalogues suffisamment tôt et ont voulu profiter le plus longtemps possible du veau d’or qu’a été le CD – puisque nous avons été amenés à remplacer nos microsillons par ce nouveau support en rachetant les mêmes œuvres, souvent interprétés par les mêmes artistes –, les internautes partagent et échangent des fichiers pour avoir accès à un plus grand nombre de contenus. C’est ce que, dans les discours officiels, on désigne par les termes un peu connotés de « démocratisation culturelle ».
    Or vous mettez ces internautes sur le même plan que les contrefacteurs, qui, seuls, du reste, méritent le nom de pirates et qui – pour le dire vite, car mon temps de parole expire dans trois secondes – téléchargent illégalement pour se faire du fric."

Sources

April
Assemblée nationale